Actualité générale

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Hommage à Simone Veil au Camps des Milles organisé par le CRIF
22-01-2018

Allocution de Raymond ALEXANDER et Alain CHOURAQUI .

Au centre Pierre François VEIL Président du Comité Français pour Yad VASHEM et

François HEILBRONNVice Président du Mémorial pour le SHOAH

 

Discours de Raymond ALEXANDER

Par le hasard du calendrier, nous sommes aujourd’hui le 21 janvier, date anniversaire du drame qui frappa Marseille il y a 75 ans le 21 janvier 1943.

En effet lorsque les alliés débarquent en Afrique du Nord, les Nazis envahissent la zone « dite libre » le 11 novembre 1942.

Après leur arrivée à Marseille, le 12 novembre, les Allemands, prennent prétexte des attentats organisés par la Résistance pour faire un exemple.

Ils décident de détruire le quartier nord du Vieux-Port, quartier historique de Marseille, qui à leurs yeux est une zone de Résistance, de crime, de vice, et de saleté.

Ce sont les forces de l'ordre françaises (12.000 policiers) qui devront assurer l'évacuation du quartier sous le contrôle des SS du Colonel GRIESE.

Avant de raser ce quartier il faut évacuer la population et ce sera l’occasion d’un gigantesque contrôle d’identité.

Et c’est un Français René BOUSQUET qui en collaborateur zélé proposera d’étendre ces opérations au quartier de l’Opéra.

Dès le 21 Janvier le Vieux-Port est bouclé et 20 000 personnes ont deux heures pour préparer les bagages qu'ils sont autorisés à emporter.

2500 personnes sont raflées autour du quartier de l'Opéra avec une brutalité inouïe, les gens emmenés dans la tenue dans laquelle ils étaient au moment où les policiers ont franchi leur porte, sans bagage ni objet personnel.

Parmi les 6 000 personnes arrêtées, 782 juifs, seront dirigés vers les camps d'extermination de SOBIBOR et AUSCHWITZ, le reste des raflés ira vers ORIANENBURG-SACHENHAUSEN, d’où bien peu reviendront.

Alors souvenons-nous de ces souffrances, de ces personnes déportées à cette occasion mais aussi de toutes celles qui en d’autres occasions pour aller vers la mort sont passées par ici.

Au bout de la voie ferrée les attendaient les wagons à bestiaux pour les amener vers la mort inéluctable, s’ils arrivaient à rester vivants pendant le voyage.

L’homme qui se targue d’être humain est aussi capable de la pire inhumanité

Nous ne devons rien oublier.

C’est pour cela qu’a été créée la Mémoire Vive de la Résistance.

C’est dans des lieux identiques et des wagons semblables que Simone Veil alors âgée de 16 ans se retrouva.

Je la vois, belle jeune fille, prostrée dans un silence inquiet, jetant son beau regard bleu autour d’elle, s’interrogeant sur son avenir et celui de ses parents.

Elle ne savait peut-être pas très précisément ce qui l’attendait, mais elle savait que la mort était au bout du voyage.

Honte à la police de Vichy qui se livrait à de telles rafles.

Et tout ça pour quoi ?

Parce que cette jeune fille portait une étoile jaune, mais la honte n’était pas de porter une étoile jaune, la honte c’est que l’on ait pu, en France, lui imposer de la porter.

Alors dans ce pays occupé, collaborant avec l’envahisseur au-delà de toute espérance, il y eut heureusement des hommes qui ne purent l’accepter.

Certains, sachant ce que leurs actes représentaient comme risque pour eux, refusèrent cette honte.

Simone put, un temps profiter de la protection de son professeur de lettres classiques, Madame de Villeroy, enseignante au lycée Masséna et nombreux sont les Français qui protégèrent des enfants ou des adultes qui n’avaient rien fait d’autre qu’être juif.

Ces hommes et ces femmes agirent dans l’ombre par simple humanité pour protéger un autre humain, on leur donnera le nom de JUSTES parmi les Nations.

D’autres, décidèrent d’aller plus loin ou d’agir autrement, en s’engageant dans une lutte armée.

Leur motivation à eux ressortait de la volonté de ne pas accepter ce qui se passait alors, quitte à en mourir.

On les appellera Résistants, Résistants car ils transgressaient les lois qui leur étaient imposées par le régime de Vichy et ses collaborateurs défaitistes.

Ce n’était qu’une poignée d’hommes qui se sont engagés, par amour de leur pays, par amour de la liberté, par rejet de l’occupant, sans chercher autre chose qu’à servir leur pays et qui n’acceptaient pas que la France, pays des Droits de l’homme, livre à l’ennemi certains de ses fils.

Ils se sont engagés au péril de leurs vies, en pleine connaissance des risques qu’ils encourraient, convaincus que ce faisant, il ne faisait que leur devoir.

Ils étaient souvent les fils de ceux qui vingt ans auparavant, de 1914 à 1918, s’étaient sacrifiés pour défendre chaque mètre carré de terre de leurs pays.

Parfois très jeunes, sortant de l’adolescence, ils ont ramassé l’honneur de la France, piétiné par l’envahisseur nazi et les collaborateurs défaitistes.

Comme dit CAMUS, pour eux « mieux valait mourir debout que vivre à genoux ».

Un Résistant sur deux a donné sa vie pour la France pour que nous puissions vivre dans un pays libre.

Tous, Justes ou Résistants ont fait honneur à leur famille, mais bien plus, par leur engagement ils ont fait honneur à la France.

Alors qu’est devenue notre jeune fille au regard clair.

Traversant ces épreuves elle est revenue plus forte, mais marquée à vie par ce qu’elle avait vécu.

C’est avec ce souvenir gravé dans sa mémoire qu’elle put mener la carrière que l’on sait et avoir l’affection et le respect des Français.

Ceux-ci n’ont jamais oublié ce qu’elle avait vécu, elle qui toute sa vie a gardée gravé sur son bras le numéro 78.651, comme pour lui rappeler ce qu’elle ne pouvait oublier.

Nombreux en revanche ne sont jamais revenus et parmi eux combien de grands savants, d’artistes, de grands écrivains ou de grands médecins perdus dans ce chemin sans retour.

Alors regardant ces lieux dans lesquels vous êtes, les drames vécus par ceux qui les ont traversés, les actions des Justes qui ont cherché à les sauver, les actions des Résistants qui ont lutté pour la libération du pays, et les morts qu’ils ont eus, parfois fusillés en criant Vive la France,

N’oublions pas,

Ne les oublions pas,

N’oublions jamais.

Raymond Alexander

Président de la Fédération Nationale de la Mémoire Vive de la Résistance.



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