Arrivé en mission en France venant de LONDRES, le 14 Novembre 1943, comme chef saboteur de la Région B, adjoint au D.M.R. (Colonel BONNIER), je prends contact dès le 20 Novembre avec de nombreux groupes de résistants en Gironde, Charente, Charente-Maritime, Basses Pyrénées, Landes.
Dès le 15 Décembre 1943, je forme une petite section de sabotage avec OLIVAIN Dents, PAPINEAU Louis, employés SNCF, le docteur CABANNE, de ST-ANDRE-DE -CUBZAC (Gironde).
Nos premiers sabotages, sur l'ordre de LONDRES, furent les dépôts de locomotives de SAINTES et de ST-MARIENS (en tout 15 locomotives sabotées) et un dépôt de cuir.
Le 10 Février 1944, notre réseau est presque entièrement détruit par la Gestapo. Mon chef le D.M.R. BONNIER, est arrêté. Refusant de parler, il est torturé.
Il s'empoisonne au Fort du Hâ. J'arrive difficilement à quitter BORDEAUX dont les gares, ponts et routes sont gardés.
Mes refuges sont "donnés", mes radios sont pris.
Je n'ai plus aucun contact avec LONDRES. Je décide de créer une section de sabotage en Charente. Pour cela je reprends contact avec les éléments du B.O.A. (Charente), de notre réseau, qui sont eux-mêmes sans contact avec LONDRES. Ce sont: FRANC Charles, CHABASSE René, RISPARD René, DURUISSEAU Edmond, BERGER Guy.
Nous nous organisons dans les bois de la Forêt d'Horte et commençons nos sabotages.
Le 21 Février 1944, René CHABASSE faisant une liaison à ANGOULÊME est abattu par la Gestapo; j'apprends l'arrestation du docteur CABANNE, à ST-ANDRE-DE-CUBZAC (Gironde).
Il sera déporté et ne reviendra pas. OLIVAIN et PAPINEAU sont réfugiés à RUFFEC (Charente).
Ci-dessous la liste des divers camps:
- Le Mas de Vouzan (Charente) du 5 Mars au 15 Mars 1944
- Bois-Bourreau Rougnac (Charente) du 15 Mars au 01 Avril 1944
- Bois-Blanc Touvre (Charente) du 01 Avril au 14 Avril 1944
- Forêt de Ruffec (Charente) du 14 Avril au 23 Avril 1944
- Bioussac (Charente) du 23 Avril au 30 Avril 1944
- Forêt d'Horte (Charente) du 30 Avril au 13 Mai 1944
- Bois-Blanc Touvre (Charente) du 13 Mai au 22 Mai 1944
- La Bistandille Maffia (Charente Maritime) du 22 Mai au 10 Juin 1944
- Barbezières (Charente) du 10 Juin au 16 Juin 1944 (Groupe René)
- Moulin du Milieu (Charente) du 16 Juin au 20 Juin 1944 (Groupe René)
- Forêt d'Horte Coudour (Charente) du 20 Juin au 02 Juillet 1944
- Camp du Chadeau (Dordogne) du 02 juillet au 22 Juillet 1944
- Jonction du Groupe René le 08 Juillet 1944
- Camp de Puychamaud Pigut (Dordogne) le 22 Juillet 1944
Je prends contact avec un autre groupe commandé par GIN Albert et comprenant : DELAGE Robert, MARQUET Marc, NWELLE Henri, TOURNIER Pierre, DUCHAILLE René, GLANGETAS Gilbert.
Ce petit maquis fera de nombreuses opérations avec nous et finalement, en Juin 1944, il se joindra à la Section Spéciale de Sabotage.
Le 14 Avril 1944, nous nous déplaçons dans la région de RUFFEC d'abord, dans la Forêt aux Loges, puis dar5 le parc du Château de Bloussac. Sabotage de SAINT-SAVIOL (Vienne) : un train chargé de minerai venant d'Espagne (Tungstène). A ce moment, OLIVAIN et PAPINEAU nous ont rejoints et trois nouveaux éléments sont entrés à la S.S.S.
Notre effectif est donc le suivant: NANCY Jacques, RISPARD René, BERGER Guy, OLWAIN, Denis, DODART Elle, SUSINI Marc, DUSSART Jacques, DURUISSEAU Edmond. Plus l'équipe GIN en liaison avec nous.
Nous disposons pour nos sabotages d'une camionnette Diésel 800 kg donnée par DODART. Le 30 Avril 1944, nous revenons dans la Forêt d'Horte près des ruines du Château d'eau de la gare. Le 13 Avril 1944, Camp de Bois-Blanc, sabotage de 16 pylônes à haute tension alimentant les usines d'aviation et de ciment de LA COURONNE (18.05.1944). Accrochage de MALAVILLE entre des éléments du Groupe GIN et la Gestapo d'ANGOULÊME, le_09.05.1944.
Le 22 Mai 1944, installation du camp à la Bistandille, près de BEAUVAIS-SOUS-MATHA (Charente-Maritime). Déraillement d'un train allemand à ST-AMAND-DE-BOD (Charente).
Le 6 Juin 1944, nous décidons d'intensifier nos sabotages : lignes BOREAUX-PARIS, BORDEAUXNANTES, lignes à haute tension. Chaque nuit nous faisons dérailler des trains et sabotons les voies ferrées.
Entre temps, de nouveaux volontaires sont arrivés.
La situation est la suivante:
- Camp de Charente-Maritime : DODART, RISPARD, DURUISSEAU, SUSINI, OLJVAIN, NANCY, BERGER, (DUSSART a été envoyé à RUFFEC pour former un nouveau groupe).
- Camp de Charente : GIN, GIET, GLANGETAS, MARQUET, NWEIIE AIMOND, DUCHAILLE, DELAGE Robert, DELAGE André, COTINAUD Raymond, LAFAURIE Jean, DOBIOT Jacques, LAFAURIE Loulou.
- Camp de RUFFEC : DUSSART, BRUN Léo, SANTO, BOULEGUE, GASCHARD, MITCHELL.
Ces trois groupes travaillent suivant mes instructions déraillement, coupures de voies ferrées, sabotages de pylônes, ponts, routes... Chaque nuit ce sont des randonnées de 100, 200 et même 300 kilomètres.
Les harcèlements des voies de communications s'intensifient considérablement; il y a quelques accrochages, mais peu de pertes car les hommes sont disciplinés, très entraînés.
Les itinéraires préparés minutieusement, toutes les chances de succès sont mises de notre côté pour ces opérations qui sont souvent très dangereuses. Cependant la liaison entre ces divers groupes très éloignés devient difficile, la circulation de plus en plus dangereuse, les hommes fatigués par les sabotages sont obligés de veiller continuellement et de se déplacer souvent.
Devant cette situation, je décide de prendre contact avec une région libérée par le Maquis où nous trouverons la sécurité et le repos au retour des sabotages et embuscades.
Je prends contact le 15 Juin 1944 avec le Maquis de Dordogne-Nord A.S.5, à NONTRON. Je rencontre BAC (futur Colonel BAC) à SAINT-SAUD (Dordogne) le 17 Juin. Il est décidé que nous nous installerions dans la région de NONTRON (Dordogne). L'A.S.5 nous ravitaillera en vivres et explosifs, nous conserverons notre complète autonomie et n'interviendrons que dans le cas d'une attaque massive de l'ennemi.
Mes trois groupes (Charente-Maritime, RUFFEC et Charente) montent en Dordogne le 2 Juillet 1944 et nous nous installons au Château, près d'AUGIGNAC (Dordogne), sous les tentes.
Nos sabotages continuent nombreux sur les voies de chemin de fer, de belles opérations sont réussies : déraillement d'un train de troupes à LA COURONNE, le 6 Juillet 1944. Sabotage de 5 pylônes à haute tension à GENAC (Charente). Déraillement à SAINT-AMAND-DE-BOD et celui de CHAUFFOUR, près de RUFFEC, de trains de troupes allemands, les 31 Juillet et 1er Août 1944 etc...
Les volontaires continuent à arriver. Ils sont sélectionnés et doivent faire leurs preuves de courage et de sang froid. La S.S.S. commence à s'organiser en groupes : Antoine (BERGER), Bébert (GIN), Robert-le-Gendarme (PRADIER), René (OLIVAIN), François (FRANCOIS). La S.S.S. s'installe au Château de Puychamaud le 22 Juillet 1944, après une semaine de violent& pluies qui ont transpercé les tentes. Les hommes sont mouillés et n'ont plus rien à se mettre de sec.
A Puycharnaud, les S.S.S. trouveront le confort nécessaire et un repos suffisant en rapport avec leur activité fatigante et dangereuse.
Entre temps, j'ai pris contact avec une Mission Interalliée (Capitaine DELORME, Commandant américain, JO et un radio canadien). Ils me font parvenir un parachutage de deux avions (armement et explosifs). De grandes quantités d'explosifs nous sont nécessaires car notre consommation est considérable, parfois 2 à 300 kg dans une nuit. L'A.S.S de Dordogne-Nord me fournit plusieurs tonnes de plastic.
Le 16 Juillet 1944, un train blindé est signalé venant de LIMOGES et allant sur PERIGUEUX. Les Maquis de Haute-Vienne (FFPF Bernard, Bir-Hacheim et A.S.5) cherchent à l'arrêter mais leur action est peu efficace. Ils font appel à la S.S.S. qui, après de nombreuses coupures de voie ferrées et la destruction du viaduc de CHALUS (Haute-Vienne), arrive à arrêter ce train blindé et force un deuxième secours à revenir à LIMOGES.
Le 24 Juillet 1944, une forte colonne de miliciens et d'Allemands (environ 800 hommes) venant d'ANGOULÊME attaque la barricade de JAVERLHAC gardée par le groupe MANU de l'A.S.5. Le barrage est enfoncé, 5 maquisards dont le Lieutenant MANU sont tués.
L'ennemi monte sur NONTRON. Il n'a rien devant lui. Le Capitaine DUPUY, commandant le 1er Bataillon de l'A.S.5, fait appel à la S.S.S. Je pars avec un premier groupe d'environ 30 hommes (Groupes GIN, PRADIER, BERGER) à VARAIGNES. Nous sommes accueillis par des rafales continues. Nous laissons approcher l'ennemi et déclenchons un tir meurtrier à 150 mètres.
Les pertes ennemies sont élevées. Cependant, poussés par les Allemands, les miliciens cherchent à nous déborder. Le Lieutenant 1USPARD arrive avec le reste de la S.S.S. (environ 35 hommes).
Nous nous dégageons, et jusqu'au soir, six heures, la lutte continue inégale entre la S.S.S. et l'ennemi qui ne peut avancer que de quelques kilomètres dans la journée. Grâce au courage et à la discipline des hommes de la S.S.S., NONTRON est sauvé ; l'ennemi repart sur ANGOULEME.
A Puycharnaud, la S.S.S. a l'effectif d'une compagnie (environ quelques 70 hommes). Des sections sont formées, Section PRADIER, TROUSSET, WAGNER, BERGER. La section de commandement comprend mes deux adjoints : OLIVAIN et RISPARD, un secrétaire et une dizaine d'agents de liaison. Le garage et le parc auto sont dirigés par DURUISSEAU. Le 20 Mai 1944, l'A.S.S, l'A.S.18, les F.T.P. Bernard, l'attaque d'ANGOULÊME est commencée. Le 31 Août, nous entrons à ANGOULÊME, libéré.
Revenue à Puycharnaud, la S.S.S. se reforme et le 1er Décembre 1944, nous sommes rattachés au 1er Bataillon du 50e R.I. (ex A.S.5) commandé par le Commandant DUPUY. Depuis la prise d'ANGOULÊME, la S.S.S. participe à la libération de la Charente et à l'investissement de ROYAN.
Le 1er Novembre, nous quittons le Front de ROYAN pour la Dordogne où nous devons être rééquipés. Le 1er Bataillon est alors commandé par le Commandant PLASSART.
Nous devenons la 2e Compagnie.
En Décembre, retour sur le Front de ROYAN où nous passons l'hiver. Participation à l'attaque de ROYAN ; point d'appui de BRIE et avance dans la région de MORNAC SUR SEUDRE et BREUILLET.
En résumé:
- du ler Décembre 1943 au 1er Janvier 1944, la S.S.S. est formée de 4 hommes;
- du 1er Janvier 1944 au 6 Juin 1944, la S.S.S. est formée de 4, puis 6 et 9 hommes et dirige les opérations d'un autre groupe (GIN).
Après le 6 Juin, les volontaires sont acceptés ; plusieurs groupes de sabotages sont alors formés
- 1 groupe en Charente-Maritime (OL1VAIN),
- 1 groupe en Forêt d'Horte (JACQUES),
- 1 groupe à RUFFEC (DUSSART).
Le 8 Juillet 1944, ces trois groupes sont réunis en Dordogne au Camp de Chadeau, près d'AUGIGNAC (la S.S.S. est rattachée à PA.S.5 pour son ravitaillement, mais reste autonome pour les opérations de sabotage).
Le 1er Décembre 1944 La S.S.S. s'intègre au 50e R.I et devient 2e Compagnie.