Journal de l'UNEG
L'Union Nationale des Evadés de Guerre
Va bientôt disparaître. Cela ne touche guère
L'ensemble des Français car tous ces Evadés
Sont depuis soixante ans. délaissés, oubliés_
On leur avait pourtant fait de belles promesses
En vantant leur courage et leur folle hardiesse !
On leur avait fait croire qu'ils auraient un statut...
Ce statut "arlésienne", ils ne l'ont jamais eu !...
Un ministre pourtant a tenté quelque chose,
Le ministre a changé, son action est forclose.
Mais la page est tournée, les Evadés sont las
De ces vaines promesses, de tous ces bla - bla - blas
Ils auraient bien voulu, comme reconnaissance,
Que l'évasion soit un acte de résistance,
Mais on leur refusa ! Le fait de s'évader
(Au péril de sa vie) "ce n'est pas résister !"
Ils auraient mérité d'avoir les mêmes droits,
Les mêmes avantages enfin, que l'on octroie
A tous les prisonniers, cette immense cohorte
Qui attendait, docile, qu'on lui ouvre les portes...
Eux, n'ont pas attendu, et parce qu'ils sont partis
Gagner leur liberté, ils en payent le prix !...
Ils ont eu parmi eux d'authentiques héros,
Le plus connu de tous : le Général Giraud
Qui, dans ses soixante ans, accomplit la prouesse
De s'enfuir en plein jour... d'où ?... d'une forteresse
Son idée était de reprendre le combat
En faisant son métier, son métier de soldat.
Et même dans les camps, l'Evadé est rebelle,
Il renacle, il regimbe en préparant “la belle-.
J'en ai bien connu un qui s'évada cinq fois,
Sabota les machines, brûla un tas de bois,
Un énorme dépôt, chose providentielle...
Pour éteindre le feu, nombre de sentinelles
Laissa partir cet homme «qui ne résistait pas»!
Mais qui, à chaque essai risquait un beau trépas.
Et je pense aujourd'hui à tous les anonymes
Qui sont restés là-bas, innocentes victimes,
En tentant simplement de sortir de leur camp
Car ils n'avaient qu'un but : c'était «foutre le camp»!
Ils en avaient assez des poux et des punaises,
Des ordres imbéciles et des tâches mauvaises.
Alors, pendant la nuit, l'un d'eux s'est échappé
Pour se trouver coincé au sein des barbebés.
Il essaie d'en sortir, s'agite et se démène,
Cela ne sert à rien, au contraire, il s'emmêle...
Il sait qu'il est perdu, on l'a vu, c'est la mort :
Une balle tirée du haut d'un mirador...
Quelles sont ses pensées à cette heure suprème?
Elles vont, c'est certain d'abord à ceux qu'il aime,
A la femme adorée qu'il n'embrassera plus