À ma mère
Mon cœur est lourd, le sable est noir,
Dans les marais hurlent les loups...
Pourtant nous conservons l’espoir
Qu'un jour nous rentrerons chez nous.
Tout au long des heures fétides,
Les membres gourds et harassés,
Revêtues de loques humides,
Dans nos baraques entassées,
Nous rêvons de magiques aurores,
De matins bleus, d’instants légers
Et de printemps prêt à éclore
Sur des diaphanes vergers.
Il faut croire à notre retour,
Croire jusqu'à la déraison.
Je retrouverai ma maison,
Havre de tendresse et d’amour
Je rayerai de ma mémoire
Ce passé qui s'accroche à nous
Quand je mettrai sur tes genoux
Mon front plus pâle que l'ivoire.
Violette Maurice
Ravensbrück 1944