Déporté-résistant,
Fondateur d'un des tout premiers journaux clandestins
Pierre Le Rolland, né à Epernay le 29 août 1920, s'est éteint à Goult (Vaucluse) le 7 août 2009.
Dès 1940, Pierre Le Rolland commence son long combat pour la liberté. Professeur à la Collégiale St-Donatien de Nantes, il crée, avec six jeunes étudiants, l'un des tout premiers journaux clandestins. Il lui donnera pour titre « En captivité».
Rapidement, une équipe se forme pour dactylographier, reproduire et distribuer l'hebdomadaire - équipe qui sera par la suite rattachée au réseau Hector de la France combattante. Pour le Dictionnaire historique de la Résistance (Robert Laffont éd.), il faut voir là «l'expression de l'un des tout premiers engagements résistants ». Ce combat, « essentiellement moral », avait un double objectif : 'défendre les valeurs menacées par la présence de l'Allemagne nazie en France et mobiliser l'opinion publique . Et, de fait, « En captivité » fut l'un des premiers organes de la Résistance à condamner le régime de Vichy et la collaboration.
Trente-cinq numéros seront distribués par un réseau d'amis et de parents à travers la Bretagne, jusqu'à St Brieuc, le Mans, et même Paris et Reims. ils paraîtront du 24 novembre 1940 au 27 juillet 1941, avec un autre journal de la Résistance : « La France continue ». Autour de ce premier journal nantais, il fondera aussi avec son père, qui sera déporté à Buchenwald (où il mourra), « les Fils de France ». Artisan de la presse clandestine, Pierre Le Rolland savait que la guerre se gagne également par une presse porteuse d'espoirs, de combat et de liberté.
En 1941, commencent dans la région les premières arrestations. En juin 1941, recherché par la Gestapo de Nantes, il doit se réfugier à Chartres, chez sa soeur. Très vite, Pierre Le Rolland rejoint à Paris le mouvement Combat-zone Nord. Puis, sous le pseudonyme de Paul Lacroix, courtier en timbres, il devient l'agent de liaison de son chef, le capitaine Robert Guédon.
Fin juin 1942, dénoncé avec d'autres camarades, il est arrêté et interné à la prison parisienne du Cherche-Midi. Condamné par le tribunal du Peuple de Sarrebruck à cinq ans de forteresse, Pierre Le Rolland est déporté en novembre 1944 à Oranienburg-Sachsenhausen, sous le régime du décret Nacht und Nebel (NN. : Nuit et brouillard) désignant les déportés qui devaient disparaître sans laisser de trace.
Libéré par les Alliés à Parchim, le 4 mai, il rentrera en France le 22 mai 1945, survivant par miracle à l'inimaginable.
Avant d'"embrasser définitivement la carrière de journaliste, il sera attaché ministériel dans le premier gouvernement provisoire de la France libérée, au titre du MRP, parti né de la Résistance. Ensuite, Pierre Le Rolland sera journaliste au Monde et à 1'Est Républicain, à Nancy.
Puis, en qualité de responsable des relations extérieures, il rejoindra les éditions Nathan et les éditions Hatier, spécialisées dans l'édition de livres scolaires pour la France et l'étranger. Le combat de Pierre Le Rolland pour la France et la liberté est retracé en particulier dans « l'Histoire de la Résistance en France », d'Henri Noguères, et dans les ouvrages d'Henri Amouroux.
« Pardonne. N'oublie pas ». Pierre Le Rolland avait gravé ces mots dans sa mémoire comme ils sont gravés sur le mémorial de la Déportation dans l'ile de la Cité à Paris. « Le passé est la trame de notre avenir, Il permet de se construire et de construire autour de soi », tel était son credo.
À partir de 1967, installé en Provence, à Goult (Vaucluse), il animera inlassablement des colloques, des conférences et des expositions sur la presse clandestine et la déportation - plus particulièrement 1es déportés «NN ».
Pierre ne pouvait oublier ni son action dans la Résistance, ni les souffrances qu'il avait endurées. Il se refusait à laisser dans l'oubli tous ceux qui avaient combattu avec lui et comme lui, et tous ceux qui ne sont jamais revenus. II mentionnera toujours, lors des cérémonies commémoratives, les sacrifices consentis par ceux qui ont payé de leur vie le retour de la liberté, et rappellera leurs devoirs à ceux qui sont aujourd'hui libres de vivre.
Pierre Le Rolland était commandeur de la Légion d'honneur.
Il avait notamment été président des Médaillés de la Résistance.
Cristiani-Fassin
Président du Mémorial régional Jean MOULIN.