14/02/1925-12/09/2013
Gilbert May, nous a quittés, le 12 septembre dernier, dans sa 88e année. Membre du CAR, Trésorier National depuis 2007, il était Président départemental du Bas-Rhin depuis 1993.
Gilbert May était né le 14 février 1925. Sa famille, juive et strasbourgeoise, s'était réfugiée dans le Cher en 1940.
L'université de Strasbourg s'était repliée en zone libre, à Clermont-Ferrand', Gilbert devient étudiant dans la capitale auvergnate, en faculté de droit. « D'esprit résistant », comme il se définissait lui-même, il rejoint le mouvement « Libération Sud » en 1943 et intègre un maquis du départeMent de la Creuse.
Sa famille a également cruellement souffert de la répression : son père, résistant, a été fusillé par la Milice à Saint-Amand-Montrond (Cher), son frère, résistant, a été arrêté puis abattu dans une prison près de Cologne.
En 1944, il est membre du maquis « Cher Sud », « compagnie Surcouf ».
Le 19 juillet 1944, lors d'un combat avec les Allemands, une balle lui traverse la gorge, blessé il est fait prisonnier. 11 a 19 ans.
« J'ai passé une semaine entre les mains de la Gestapo. Je me faisais appeler Jean Michot. Heureusement, ils n'ont pas remarqué que j'étais juif.. Sinon, ça aurait été Auschwitz, ou une balle dans la tête. »
« Au lieu de ça », c'est le départ pour le Struthof. Le voyage en train dure deux jours et demi (il est retardé par une attaque de maquisards), sans manger ni boire. « Nous étions 100 par wagon, 50 couchés, 50 debout. On inversait toutes les deux heures. »
Dès l'arrivée au camp, vers le 20 août 1944, le message est clair : « On nous a dit : "Vous entrez par la porte, vous sortirez par la cheminée 1" Puis, on nous a fait descendre à la douche, à côté du crématorium. On sentait des odeurs, je ne savais pas ce que c'était. On nous a « mis à poil », on nous a rasés. Dès ce moment, pour eux, nous n'étions plus que des "Stück", des trucs... »
Conçu pour 2500 personnes, le Struthof abrite alors plus de 7000 détenus, qui sont décimés par les travaux dans la carrière, les appels incessants (trois par jour, un de plus qu'à Dachau), les maladies, la nourriture quasi inexistante (à midi, soupe aux choux sans chou, le soir cent grammes de pain, rondelle de saucisse et une sorte de café).
Paradoxalement, sa blessure à la gorge (qui n'avait été soignée que par un pansement que possédait son frère) sauve Gilbert : « J'ai réussi à entrer à l'infirmerie au bout de deux jours. Du coup, je ne travaillais pas. Seuls sont revenus ceux qui avaient de la chance. »
Gilbert reste moins de quinze jours au Struthof : le camp est évacué début septembre devant l'avancée des Alliés libérateurs.
Gilbert est envoyé à Dachau, d'où il ne sera libéré qu'en avril 1945. « Le principe était le même, mais le grand choc, je l'ai vécu au Struthof. Car c'était la première fois... »
Après son retour de déportation, en 1945, il s'est tu, pendant une quinzaine d'années. Il était vital de passer à autre chose. II mènera carrière dans les affaires et restera impliqué dans le monde des anciens combattants et des anciens résistants et déportés.
Puis, il est devenu tout aussi vital de témoigner.
Il sera vice-Président des anciens déportés de Dachau, trésorier général national de l'Union nationale des déportés, internés et familles de disparus (UNADIF) et de la Fédération nationale des déportés et internés de la Résistance (FNDIR), Président départemental du Bas-Rhin pour ces deux associations... Il sera également très actif dans la transmission de la mémoire, participera au concours national de la Résistance et de la Déportation, interviendra sans cesse dans les collèges et les lycées.
«Je me rends dans une dizaine d'établissements scolaires par an, sans compter les visites sur le site du Struthof. C'est douloureux, il y a toujours quelque chose qui remonte. Mais il faut le ,frire, c'est indispensable. Il faut se battre pour dire aux jeunes que leur liberté, ils la doivent à des personnes qui sont mortes pour elle. Et ça les intéresse:'
.. Quand je sors d'un collège, je suis regonflé ! » Il y a encore quelques mois, Gilbert disait :
"Aujourd'hui, il ne reste que très peu de survivants du camp nazi d'Alsace. C'est pourquoi je dois toujours parler. Et ce que je veux absolument dire, c'est que le mot le plus important, c'est le mot tolérance."
Gilbert MAY était officier dans l'Ordre national de la Légion d'honneur, Commandeur dans l'Ordre national du Mérite, Médaille d'Argent Jeunesse et Sport.
Titulaire de nombreuses décorations, dont la Médaille militaire, la Croix de guerre 1939-1945, la Croix du Combattant, la Croix du Combattant volontaire, la Croix du Combattant volontaire de la Résistance, la Médaille de la Déportation pour faits de Résistance.
Texte transmis par François PERROT Président national de la FNDIR
SOURCES VOIX DE LA RESISTANCE 271 décmebre 2013