Résistants, Personnalités liées à la Résistance

Résistants, Personnalités liées à la Résistance

Pierre BROSSOLETTE

 Pierre BROSSOLETTE est né le 25 juin 1903, dans une famille de forte tradition républicaine. Reçu major, au concours d’entrée à l’École Normale Supérieure en 1922, puis deuxième au concours d’agrégation d’histoire il embrasse la carrière de journaliste.

Il se marie en 1926 et a deux enfants, nés en 1927 et 1928.

Dès 1924 il s’engage dans le sillage d’Aristide BRIAND, en faveur d’un nouvel ordre international pacifique. Et adhère à la SFI0 en 1930.

II s’envole pour Londres dans la nuit du 28 au 29 avril 1942. A peine arrivé, il remet au BCRA un rapport sur l'état de la France, depuis l’armistice.

André DEWAVRIN alias colonel PASSY le décrit comme" un homme petit et mince, doté d’une abondante chevelure noire comme le jais, mais curieusement traversée par une mèche de cheveux blancs. Il avait des yeux bruns et vifs qui pétillaient de malice et d’esprit; …. BROSSOLETTE fut sans conteste, l’homme qui, parmi tous ceux que j’ai été amené à rencontrer dans ma vie fit sur moi la plus forte impression. Son esprit pétrissait et assimilait les idées à une vitesse telle que bien peu de gens étaient capables d’en suivre le rythme étourdissant....»

Devenu « Gaulliste» convaincu Pierre BROSSOLETTE s’impose comme l’une des personnalités les plus marquantes de la France Libre.

A la fin du printemps 1942, ‘Pierre BROSSOLETTE soumet au Général DE GAULLE un projet qui porte en germe la Constitution de la République.

A la fin du mois de mai 1942, il doit rentrer à Paris, car sa femme et son fils sont menacés par la Gestapo. Arrivé à PARIS, il décide de vendre sa librairie et fait passer ses enfants en Angleterre, par mer, de Cassis à Gibraltar. De retour à Londres, il est élevé au rang de Compagnon de la Libération le 20 octobre 1942, au titre de la Résistance Intérieure.

Lors de son allocution du 23 septembre 1942 au micro de la BBC, il s’adresse avec émotion, sous véritable identité, à ses frères en souffrance. Le mythe d’une France, toute entière résistante, derrière le Général DE GAULLE, arc-boutée sur le geste fondateur du 18 juin 1940, est ainsi exalté : «... Ces Français, ces Françaises ils savent bien, certes, que ce n’est pas pour un homme que nous nous battons, mais pour une cause, que ce n’est pas un homme qui nous a rejetés dans la bataille, mais un geste, un sursaut — son geste, son sursaut— et que peu importe, en principe, le nom dont est signé le texte historique, qu’aujourd’hui encore je ne puis relire sans que l’émotion me saisisse à la gorge, le texte que vous devriez tous savoir par cœur...»

Dans la nuit du 26 au 27 janvier 1943, Pierre BROSSOLETTE quitte l’Angleterre pour effectuer sa deuxième mission clandestine en France occupée. C’est la mission «Brumaire Arquebuse «. Aidé du Colonel PASSY et de l’officier Anglais Edward YEO THOMAS, il organise la coordination civile et militaire de la Résistance en zone nord et met sur pied le Conseil National de la Résistance avec Jean MOULIN et le Général DELESTRAINT. Au retour de cette mission, dans la nuit du 15 au 16 avril 1943, Pierre BROSSOLETTE devient l’unique adjoint du Colonel PASSY à la tête du BCRA. Le 23 mai 1943, il reçoit des mains de Charles de GAULLE la Croix de la Libération.

Il remplace Maurice SCHUMANN dans les cinq minutes d’émission quotidienne de la BBC, Honneur et Patrie et, du 29 mai au 27 juillet 1943, prononce, au total, 38 chroniques.

Pour préparer les esprits de ses auditeurs à la naissance d’une France nouvelle, Pierre BROSSOLETTE consacre sa chronique du 15 juin 1943, à dénoncer la propagande mensongère de VICHY et de la collaboration, pour célébrer l’épopée déjà légendaire des héroïques soldats de BIR HAKEIM : «...Lisez tous ces récits d’une période où les escamoteurs du pouvoir n’ont rivalisé que de zèle à hisser le drapeau blanc sur leur pays anesthésié. Et puis fermez les yeux et songez à ce mot magnifique de KOENIG. septembre 1943, Pierre BROSSOLETTE atterrit à Angoulême pour préparer la succession de Jean MOULIN à la tête du Conseil National de la Résistance. Il a transformé son apparence physique, cheveux en brosse teints en noir, vêtements de sport. Rappelé à Londres par le Général DE GAULLE lui-même, après une série d’arrestations dans les rangs de la Résistance, il refuse d’obtempérer considérant sa mission comme essentielle.

A cette même époque des gens comme Félix GOUIN, représentant de la SFIO auprès du général DE GAULLE, Daniel MEYER et Gaston DEFERRE décident au sein du parti Socialiste clandestin, d’exclure Pierre BROSSOLETTE.


Henri FRENAY, Compagnon de la Libération, créateur du mouvement de Résistance «Combat» dira dans ses mémoires : « Journaliste, normalien, militant socialiste avant la guerre, il était à LONDRES, devenu suspect à plusieurs de ses camarades de la SFI0, notamment Félix GOUIN, car il estimait nécessaire de renouveler et de rajeunir les cadres, les méthodes et même la doctrine de la vieille maison. Son influence sur DE GAULLE n’était pas négligeable. Nous sommes quelques-uns à nous demander si le cours des événements n’aurait pas changé dans la France libérée si Pierre BROSSOLE7TE, notre ami, avait vécu...»


Jacques BAUMEL, Compagnon de la Libération, dans ses mémoires décrit magnifiquement la fin tragique de Pierre BROSSOLETTE :»... C’est pendant cet automne 1943 que j’ai revu Pierre BROSSOLEITE pour la dernière fois. Rétrospectivement cette scène m’a paru extraordinaire. J’avais devant moi le même homme, ce même Pedro que j’avais rencontré pour la première fois rue de Rennes. La même volonté, la même certitude de réussir, la même ironie. Au début du mois de décembre, BROSSOLETTE reçoit de Londres un ordre impératif de départ... Les conditions météo sont épouvantables deux mois durant et les liaisons aériennes quasiment interrompues. Le 2 février 1944 BROSSOLETTE et d’autres membres de la Délégation rejoignent les cotes de Bretagne et embarquent avec une vingtaine d’aviateurs anglais et américains dans un rafiot qui porte cruellement le nom de « jouet des flots ». Et les flots se joueront de lui. Le bateau s’abîme contre un récif, commence à prendre l’eau, tombe en panne et doit regagner le rivage au petit matin. Les passagers s’éparpillent... BROSSOLETTE tente de se cacher, il est dénoncé et arrêté, Il restera un mois incarcéré à la prison de Rennes, sans être identifié. On a souvent dit que BROSSOLETTE avait été trahi par cette mèche blanche qu’il avait dans les cheveux et qu’il devait teindre pour la dissimuler. Elle serait réapparue durant son séjour en cellule. Son identification semble plutôt être venue de l’arrestation à la frontière espagnole d’un courrier de la délégation qui était porteur d’un message signalant son arrestation ;... BROSSOLE1TE est amené le 19 mars dans les locaux de la Gestapo 84 avenue Foch. Il est affreusement torturé Le 22 mars, il parvient à échapper à I ‘attention de ses bourreaux et se jette du haut d’une cage d’escalier. Les Allemands le laisseront agoniser sur le sol Il mourut à l’hôpital...»

Daniel CORDIER, Compagnons de la Libération encore vivant, qui fut le secrétaire de Jean MOULIN dit de lui : Pierre BROSSOLETTE appartenait à cette cohorte sacrée de résistants qui à la question lancinante qui se posait à tous : quel homme suis-je devant la torture ont répondu en choisissant la mort. Dans la solitude de leur conscience, Bertie ALBRECHT, BINGÈN, BROSSOLTTE, MOULIN, SCAMARONI et tant d’autres à jamais inconnus, ont choisi délibérément de quitter la vie par le haut. C’est-à-dire dans le silence suicidaire d’une fidélité intégrale à leurs camarades et à leur foi...»

> Quel est l’héritage de Pierre BROSSOLETTE? Ils étaient des volontaires et des volontaires d’une espèce rare, comme la défaite seule peut les faire naître. Ils étaient donc marqués d’un signe spécial, Tracé sur leur front dès le premier jour Par un acte de leur libre volonté...» 
(Pierre KOENIG Compagnon de la Libération)


Maurice SCHUMANN. Sur le Mémorial des Compagnons de la Libération, on peut voir s’exprimer, page 267, le porte-parole de la France Libre, au jour de la Libération de Paris : «C’est le 28 août 1944 que nous avons senti l’irréparable poids de son absence. A l’instant précis où le Général DE GAULLE, au lieu de prendre place dans l’une de ces voitures officielles qui interposent une muraille mouvante entre le peuple et ses guides, posa le pied sur le premier pavé des Champs Elysées, nous fûmes saisis d’une atroce angoisse. La plus belle seconde qu’un homme pût vivre nous faisait mal au cœur, il est vrai que le ciel était lourd de tous les morts qui, en choisissant leur place dans la bataille, avaient, pour toute récompense, entrevu cet instant. Mais leur visage meurtri se composait en une seule et les lèvres de Pierre BROSSOLETTE n’étaient point closes. Elle se rouvraient pour relire la prophétie tranquille et chaleureuse que, le 23 septembre 1942, elles avaient énoncée, tout près de moi, dans un studio souterrain de la BBC : A vous tous qu’a soulevé d’un même souffle le geste du 18 juin 1940, je dis : Français, ne craignez rien, l’homme est à la mesure du geste, et ce n’est pas lui qui vous décevra lorsqu’à la tête des chars de l’armée de la délivrance, au jour poignant de la victoire, il sera porté tout au long des Champs Elysées, dans le murmure étouffé des longs sanglots de joie des femmes, par la rafale sans fin de vos acclamations. Savait il le prophète du 23 septembre 1942, qu’il ne serait point-là le jour où s’accomplirait la parole! Quand il écrivit sa longue phrase et quand il la polit et quand il la relut et quand il la prononça, eut-il peur, lui qui n’avait point peur, des images que lui proposait son propre verbe il était bien trop actif et bien trop grand pour prendre la peine d’avoir un pressentiment Plus simplement, plus noblement, il était de ces hommes qui, par horreur du destin subi se livrent au destin choisi, sans se retourner sur autrui, ni peut être sur eux-mêmes. Il y a quelque chose de plus beau que la dernière lettre d’un condamné à mort pour délit d’espérance, c’est le silence de l’abnégation.



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