Les Faits d'Armes, Ecrits, Récits

Les Faits d'Armes, Ecrits, Récits

L'ORA dans les BASSES-ALPES par Boris de GUEYER
Année 1940

©  par Boris de GUEYER

Avec son aimable autorisation

Le Commandant Vigan-Braquet peut être considéré comme le fondateur de l'O.R.A. dans les Basses-Alpes.

Dès l'installation de son Bataillon - le 200 B.C.A. - à Digne en Octobre 1940, il demande à plusieurs de ses officiers de trouver des caches pour stocker des denrées alimentaires, des effets militaires et une certaine quantité d'armes qui n'avaient pas été répertoriée.

Ces premières actions de résistance sont vite connues des autorités informées par des officiers ralliés à la politique de collaboration.

Après la dissolution du Bataillon en Novembre 1942, Vigan-Braquet persuade le Conservateur des Eaux et Forêts d'embaucher quelques officiers pour les maintenir dans la région. Une entreprise de topographie est créée. Cette couverture permet une libre circulation dans le département pour effectuer les liaisons et établir les contacts nécessaires.

Lorsque Lécuyer rencontre Vigan-Braquet en Mars 1943 pour lui proposer d'être le Chef Départemental de l'O.R.A., il existe déjà une structure qui ne demande qu'à être renforcée.

Cependant sa position, l'opposition de certains de ses officiers restés fidèles à Pétain, sa dénonciation à la Milice par le Capitaine Raybaud, ne lui donnent pas assez les coudées franches pour monter toute l'organisation. Aussi il propose à son adjoint le Capitaine Chaumont d'assumer cette tâche, qui accepte et commence immédiatement son travail de prospection sous le couvert des Eaux et Forêts.

Fin Juin, toujours à l'instigation de Raybaud qui s'est engagé dans la Milice, la Gendarmerie procède à l'arrestation de tous les Officiers et Sous-Officiers résidant à Digne ; ils sont relâchés faute de preuves.

Une perquisition est ordonnée chez Vigan-Braquet, sans résultat. Enfin le Colonel Lepage, commandant la subdivision, exhorte les officiers réunis chez lui, à s'abstenir de tout acte hostile envers l'occupant.

Après la découverte des armes qui avaient été confiées aux Gardes Mobiles, et dont ils s'étaient débarrassés dès l'envahissement de la zone libre, d'effets militaires chez le Capitaine Chaffin et le cambriolage d'un dépôt de vivres dont sont soupçonnés trois sergents, les autorités italiennes exigent l'expulsion de Vigan-Braquet du Département.

Il partira le 11 Août pour Uzés dans le Gard où il continuera son action dans la Résistance au sein de l'O.R.A. dont il sera le Chef Départemental.

Le 14 Juillet Chaumont rencontre Lécuyer à Digne qui lui précise sa mission : poursuite des contacts notamment avec les autres mouvements de Résistance, recherche de terrains de parachutages et lieux d'installation de Maquis, caches d'armes et de matériel.

Il désigne un officier de liaison permanent entre son P.C. et le Département en la personne du sous-lieutenant Petrochilos qui se met en rapport avec les différents contacts que Chaumont avait établis à Seyne-les-Alpes, Barcelonnette, Barrême et Digne.

Ces points de chutes lui permettent de circuler sans se soucier de l'hébergement. Il s'occupe de la répartition des vivres et effets militaires qu'il obtient auprès de l'Aspirant Tristan, responsable des magasins de l'Intendance d'une manière bien entendu illégale, et vient rendre compte à Lécuyer toutes les semaines.

En septembre au moment de la débâcle italienne, Lécuyer envoie le s/lieutenant Tilly pour essayer de négocier l'achat de quelques armes. L'opération échoue.

Par ailleurs plusieurs Maquis se forment sous l'impulsion des officiers O.R.A. : dans la région de Barce1onnette le lieutenant Busy-Débat est à la tête du Maquis de la Pare, le Capitaine Lippmann commande celui de Laverq.

Toute la vallée de l'Ubaye est sous le contrôle des Maquis, la Résistance y ayant réalisé une quasi-fusion entre les différents groupes.

Le commandement civil de ce secteur est confié à René Chabre du M.U.R. et le commandement militaire au Capitaine Bureau de l'ORA. À Barcelonnette réside le Colonel Cusenier représentant le Colonel Zeller.

Fin novembre Lécuyer décide le transfert dans les Basses-Alpes d'un Maquis qu'il avait constitué à Bugeat (Corrèze). Avec armes et bagages, sous les ordres du s/Lieutenant Bourdilleau, vingt hommes s'installent d'abord au-dessus de Chabrières puis, en février 44, à La Tour près de Saint-André.

Ce Maquis bénéficie de fournitures d'armes provenant des premiers parachutages dans la région de Thoard.

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Le Service National Maquis décide d'implanter en coopération avec l'ORA une Ecole de Cadres près de Barrême au lieu-dit Lavanderaie puis entre Draix et La Javie.

D'abord sous la responsabilité de Stéphane Courbon, elle passe en octobre sous l'autorité du Lieutenant Pierre- Rose. Cette école de cadre fonctionne jusqu'au 14 février 1944 date à laquelle les Allemands investissent le camp et font 11 prisonniers.

Pierre-Rose absent essayera de délivrer ses hommes en vain. Il abattra le dénonciateur du camp. L'école est dissoute et Pierre-Rose prend le commandement du sous-secteur d'Asse.

Il décide la création d'un nouveau Maquis à la Haute-Melle qu'il confie à l'équipe d'instruction volante de Lesdos, Roux et Vilentini. Tous trois avaient fait un stage à l'Ecole Nationale des Cadres de Maquis de Lamoura (Jura).

Arrivés le 15 Décembre 1943, ils avaient assuré l'instruction des Maquis dans la région de Séderon, Sisteron et Laragne.

Ce Maquis qui prend le nom de Fort- de - France, doit être évacué le 19 Mars à la suite dune opération montée par les Allemands : Un retour est tenté le 25, mais le vallon de la Melle est toujours occupé par l'ennemi. Lesdos et Roux qui étaient partis pour Cavaillon pour étudier la possibilité de détruire le Centre de la Gestapo, sont arrêtés à la Basse-Melle à leur retour. fis mourront en déportation. Le Maquis réoccupe la Haute-Melle début Avril.

D'autres groupes sont prêts à agir comme l'équipe des ingénieurs du Barrage de Castellane, le groupe du gendarme David qui recrute soixante hommes à Sisteron, la compagnie indochinoise de Saint-Auban sous les ordres du Capitaine Manfrino. Chaumont estime à six cent le nombre d'hommes disponibles pour l'ORA à cette époque.

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Fin Janvier a lieu à Sisteron une réunion présidée par Max Juvenal, Chef Régional M.U.R. pour réaliser l'intégration de l'ORA. A cette réunion assistent : Petrochilos et Chaumont pour l'ORA. Martin-Bret président du C.D.L. des Basses-Alpes. Morin Chef Départemental A.S. Cusin et André membres des M.U.R. Martin- Bret est désigné Chef Départemental M.U.R tandis que Chaumont est nommé Chef Départemental - la notion de F.F.I. n'était pas encore établie. Il est en outre, décidé de la création d'un Etat-Major et de la division du Département en secteur et sous-secteurs I. Etat-Major : Chef d'Etat-Major : Morin A.S. Premier Bureau chargé des effectifs : Argenti MUR. Deuxième Bureau Renseignements : Capus ORA. Sécurité : Cusin MUR. Troisième Bureau Opérations : Vernoux ORA. Quatrième Bureau Ravitaillement : Fontaine MUR ! Tristoni ORA. Transports : Silve MUR. Transmission : Bartoli ORA. II. Secteurs :

Secteur n°1 Barcelonnette-vallée de I'Ubaye : Chef civil : Chabre MUR, Chef militaire : Bureau ORA. Secteur n°2 Sisteron-St-Auban : Chef civil et militaire : Du Garreau ORA.

Secteur n°3 Manosque-Forcalquier : Chef civil et militaire : André MUR.

Secteur n°4 Digne : Chef civil et militaire : Brondi ORA. Secteur n°5 Verdon et Asse : Chef civil et militaire : Trouyet ORA.

Cette organisation est approuvée par Lécuyer, mais il refuse de faire parti du C.D.L.
Par l'intermédiaire de Petrochilos il transmet les consignes aux Chefs de Secteur :

Repérages des lieux propices aux embuscades et les itinéraires de repli. Stockages des armes et vivres. Surveillance des ouvrages d'art pour en empêcher la destruction par l'ennemi.

Les Allemands sentent que la Résistance se met en place et tentent quelques actions contre les Maquis dans la région de Mézel et de Saint-Jurs sans résultat, les groupes prévenus se dispersant.

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De Février à Mars Chaumont et Morin entreprennent une tournée des secteurs confirmant les nominations ou créant des s/secteurs (St André, Entrevaux, Asse). Chaumont est convoqué fin Mars par Lécuyer aux Arcs où il rencontre son ancien chef Vigan Braquet devenu chef ORA du Gard et Juan chef ORA du Vaucluse. Un budget de 500 000 Francs lui est attribué pour le mois. Fin Avril il se rend à Marseille pour recevoir les trois messages d'action :

"Le gendarme dort d'un œil" message d'alerte "Nous roulerons sur le gazon" Plan Vert "Méfiez-vous du Torréado" Plan Rouge

Petrochilos, quelques jours plus tard vient lui confirmer le plan général établi par Lécuyer (voir l'ORA dans la Région R2) à savoir la division des Basses-Alpes en deux zones limitées par la Durance : à l'Est la zone des Maquis, à l'ouest la zone d'influence des Maquis. Dans la zone des Maquis les secteurs doivent comporter un ou plusieurs centres de ralliements, un P.C., un service sanitaire, des dépôts de vivres et d'armes, bien entendu camouflés ou sous la sauvegarde de groupes armés.

Sont confirmés aussi les points de destruction au moment du déclenchement du Plan Vert (un pont sur le Jabron au sud de Sisteron et la voie ferrée à la sortie nord du tunnel de Mirabeau).

En mai plusieurs réunions du C.D.L. ont lieu. Sans pouvoir établir un ordre chronologique exact, on peut en situer trois :

-à Thoard, à laquelle assiste Martin-Bret, Piquemal, André et Chaumont. Cette réunion est sans doute provoquée par l'arrivée du Capitaine Chanay, chef d'une Mission Interalliée. Ce dernier assure qu'au Jour "J" les parachutages comprenant hommes, armes et matériel seront quasi quotidiens :

- à Barcelonnette, probablement le surlendemain, toujours avec les promesses de Chanay, qui hélas ne seront pas tenues, il est envisagé, sur le plan militaire de transformer la vallée de l'Ubaye en zone franche.

- à Siéyes où le C.D.L. et les F.T.P.F. concluent un accord en vue de coordonner les actions militaires, le partage des armes et des fonds.

Chaumont devient chef départemental F.F.I. avec Morin comme Chef d'Etat Major et Bonnaire chef départemental F.T.P.F., adjoint.

Les armes arrivent régulièrement. En outre la S.A.P. débloque trois parachutages pour Saint Auban et Barcelonnette.

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Le 1er juin le message d'alerte passe sur les ondes, Chaumont, Morin et Bonnaire vont immédiatement délivrer les messages des Plans Vert et Rouge aux Chefs de secteur pour action immédiate.

Ces messages sont diffusés par la BBC le 5 juin.

Le 6 juin Lécuyer donne l'ordre à son P.C. de Marseille de rejoindre Barcelonnette.

Lui-même part le 7 et constate en cours de route que le département est en effervescence.

De nombreuses routes sont sous le contrôle des Maquis, de nombreux patriotes rejoignent les centres de ralliement. Le Plan Vert est exécuté comme prévu à Jabron et Mirabeau.

Cependant, quelques initiatives locales, installations de C.D.L., ou quelques malentendus sèment une certaine confusion : l'insurrection de Manosque que Martin-Bret fait évacuer sur le plateau de Valensole,-ce dernier sera abandonné le 11, les Allemands étant arrivés en force depuis Manosque, bien que retardés par de nombreuses actions de guérilla du Commandant de Courson-, l'échec de l'attaque du poste allemand de St. Auban à la suite d'une défaillance, l'occupation puis l'évacuation de la citadelle de Sisteron.

Ces initiatives entrainent à partir du 11 juin des représailles allemandes.

Dans la vallée de l'Ubaye, où la mobilisation est générale, Bureau met en place le dispositif prévu :

Sous-secteur de Jausiers :

3 bouchons : un au Pas de la Reysolle, un à La Rochaille, un au Pas Grégoire pour isoler les postes allemands de Jausiers et de Sauze.

Sous-secteur du Bachelard :

2 bouchons ; Punau Pont la Corbière, l'autre à la Malune pour interdire l'accès des routes d'Abs et de La Cayolle.

Sous-secteur du Lauzet :

Un bouchon au Pas de la Tour pour interdire l'accès de la vallée à des éléments ennemis venant par le col St. Jean ou la route de l'Ile du Rousset.

Sous-secteur de la Bréole-Ubaye :

2 bouchons : un au tunnel sur la route de ST. Vincent, l'autre sur la RN. en amont de Ubaye.

Même mission que le s/secteur du Lauzet, mais agir en éléments retardateurs.

Sous-secteur de Barcelonnette :

Prévoir une action offensive pour réduire les postes allemands du Sauze et de Jausiers.

Le combat s'engage le 7 Juin au Sauze où les Allemands s'enferment à l'Hôtel Bompard. Le siège dure jusqu'au 10, date à laquelle les Allemands essayent de s'enfuir, mais sont rattrapés et faits prisonniers.

A Jausiers la situation est plus sérieuse pour les F.F.I. plusieurs d'entre eux sont capturés puis libérés. Les Allemands se sentant isolés tentent de gagner l'Italie, mais sont finalement arrêtés au Pont de Mats.

Le 9 Juin le Commandement allemand de Gap réagit en envoyant une importante colonne d'une centaine d'hommes dotés d'armes lourdes. Elle arrive au carrefour des routes de Gap et de Digne. Elle est arrêtée au Pas de la Tour.

L'ennemi essaye de contourner la position par le sud en empruntant les crêtes de St. Vincent. Il sera arrêté par le Maquis Lorrain et la section de Rapillard qui reçoivent l'aide du Maquis de Chorges du Lt Mermet à l'lle de Rousset.

Une menace se précise venant du nord. Lécuyer envoie Granier en mission à Guillestre pour demander aux Maquis de la vallée du Guil d'harceler l'ennemi progressant vers le Col de Vars. Cette mission ne parvient pas à destination, mais alerte le P.C. de Barcelonnette depuis Saint Paul de l'arrivée des Allemands au col le 11 Juin.

Il est à noter d'une part que Cammaert, chef du Réseau Jockey S.O.E, au courant de la situation, ne peut intervenir car il a reçu l'ordre de Londres de ne pas bouger, et d'autre part que les groupes de Guillestre faute d'armes n'auraient pu s'engager efficacement.

Seul René Eymin du Maquis d'Orres près d'Embrun tente une action de harcèlement, mais arrive trop tard les Allemands ayant franchi le col.

Les Allemands sont arrêtés au Pont Mélézen, partiellement détruit. Le 12 l'ennemi renforce son action avec l'arrivée d'une deuxième colonne de 12 véhicules.

Après d'âpres combats qui durent jusqu'à la nuit, l'ordre est donné de se replier sur le bouchon du Pas de Grégoire. Granier, Carlin, Dautremer et le Major Hay (Edgar) se joignent au groupe qui bloque le défilé. Hay sert un P.I.A.T., arme anti-char, avec succés contre les A.T. Granier, Dautremer et Hay sont blessés. Hay succombera à ses blessures.

Le 13 la lutte reprend toute la journée avec la même intensité, chaque groupe défend pied à pied ses positions.

Vers 17 heures, Bureau avec l'accord de Lécuyer et Cusenier décide l'évacuation de la vallée et de Barcelonnette en partie vers les Maquis italiens, en partie vers la haute vallée du Verdon.

Dans la nuit du 12 au 13 juin un important parachutage est réceptionné au lieu-dit "Les Thuiles" à l'ouest du confluent de l'Ubaye et du Bachelard qui permet de retarder l'entrée des Allemands à Barcelonnette (14 juin) et d'effectuer une évacuation difficile mais sans perte.

La dispersion est maintenue jusqu'à ce que l'on puisse reconstituer les stocks d'armes, de vivres et former des Maquis homogènes. On peut dire que fin juillet la vallée de l'Ubaye est à nouveau sous le contrôle de la Résistance.

De son coté Lécuyer évacue son PC sur Ratéry près de Colmars-les-Alpes.

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Plus au sud, le Maquis Fort-de-France est sur le pied de guerre. Le 9 juin il reçoit l'ordre de se porter vers Saint- André sur la route de Moriez, deux colonnes allemandes ayant été signalées venant de Digne et de Nice. L'une d'elles est attaquée au Col des Robines par la 5ème Compagnie F.T.P. commandée par un Saint- Cyrien Hutinet. Les Allemands refluent après avoir subi des pertes sur Barrême.

Cela permet à Pierre-Rose de se positionner en amont du Col des Robines.

Les Allemands déclenchent une attaque en tenaille dans la nuit du 11 ; après quelques heures de combat Pierre-Rose donne l'ordre de repli en direction de la y allée de l'Asse.

Le 15 juin un groupe se positionne sur les pentes de Creisset pour attaquer un convoi en provenance de Nice.

Un deuxième groupe se met en place derrière les rochers des Clues de Chabrières pour intercepter l'ennemi venant de Digne. Les deux groupes attendent jusqu'au 18 juin avant qu'un convoi ne se présente.

Les Allemands, surpris, subissent de lourdes pertes (18 tués, trois véhicules détruits, cinq détériorés).

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À partir du 18 juin les combats s'apaisent sur l'ensemble du département, les Maquis s'étant retirés sur les positions de repli. Par contre, les Allemands en profitent pour exercer leurs actions de représailles.

On estime à 200 le nombre de fusillés (maquisards ou civils). À la suite du message du Général Koenig : "Freinez la guérilla..." Chaumont donne l'ordre de renvoyer dans leurs foyers les gens non armés, de continuer 1'instruction et de tendre quelques embuscades.

Il s'emploie à passer cette consigne jusqu'à ce qu'il apprenne que Lécuyer a été destitué de son poste de Chef de l'Etat-Major de la R2 pour avoir déclenché trop tôt la guérilla généralisée (selon Rossi) et que lui-même était remplacé par Morin.

Une réunion est prévue le 5 juillet à Laragne pour entériner ces décisions.

Chaumont rencontre Lécuyer qui lui confirme la position de l'O.R.A. :

= Lorrain m'a mis au courant de la réunion de Laragne. Vous pouvez accepter d'être adjoint du chef F.F.I. mais vous auriez pu également refuser et n'être que chef départemental O.R.A. L'O.R.A. existe et a repris son indépendance.

= J'ai reçu un budget par avion au titre O.R.A. (...). D'autre part, j'attends pour demain ou après demain une mission interalliée qui nous est destinée.

= Je vous adresse 400.000 F. au titre O.R.A. (...), vous n'avez à rendre compte de l'emploi des fonds qu'au chef régional O.R.A. . Vous pouvez si vous le jugez utile, donner une partie de cette somme aux ET.P. pour les aider en leur faisant toutefois remarquer que cet argent ne leur est pas dû, que l'O.R.A. le leur donne parce que nous avons les mêmes buts (...). En aucun cas ne donner quoi que ce soit aux M.U.R..

= Vous pouvez imposer des chefs de secteur O.R.A. (...). À côté de O.R.A. il y aura quelqu'un de désigné par Morin (Latour), mais Latour n'a aucun ordre à donner aux chefs O.R.A.. Alger m'annonce l'envoi de matériel et de personnel pour 1'O.R.A.. Londres m'annonce l'augmentation du budget de 1'O.R.A.. Notre situation est très forte. (...).

A cette réunion présidée par Martin-Bret, sont présents : Piquemal secrétaire du CDL, Cusin, André, Favier (P.C.) Latil (FN), Bonnaire (FTPF), Morin (A.S.), Chaumont et Lippmann (ORA). Après discussion et dans un esprit de conciliation Morin est nommé Chef Départemental F.F.I. avec Chaumont et Bonnaire comme adjoints. Il est immédiatement décidé de la réorganisation des secteurs et de leur commandement.

Cela sera fait le 8 Juillet au cours d'une réunion à La Javie.

Le département est divisé en 4 districts et le commandement est confié à 4 officiers de l'ORA.

District n°1 Digne/Sisteron : Brondi.

District n°2 Forcalquier/Manosque : Capus.

District n°3 Mézel/Valensole : Lindenmann.

District n°4 Verdon/Ubaye : Lippmann.

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Le 13 Juillet Lécuyer rencontre à Colmars, Sénatore, commandant ET.P.F., pour mettre au point la cérémonie du 14 Juillet. Les Maquis O.R.A., la 5e Cie. FTP et la gendarmerie locale participent à un défilé.

Cette rencontre rapproche les deux hommes qui décident de se revoir à Guillaumes le 16 juillet.
Sont présents côté O.R.A. Lécuyer, Lippmann, Trouyet, de Lestang Labrousse, côté F.T.P.F. Senatore, Belvedere, Rossi, Schreiber, Faure. Cette réunion peut être considérée comme la plus importante qui ait jamais rassemblé dans le département les responsables O.R.A. et F.T.P.F.

Malgré, un certain nombre de divergences, principalement en ce qui concerne la formation des Milices Patriotiques, à Guillaumes, l'accord se fait sur les actions de guerilla. Lécuyer fournit à la IIeme Compagnie F.T.P. une mitrailleuse, 15 fusils américains, 15 mitraillettes Sten, 50 à 60 grenades américaines et 10 Gamons

Le 15 juillet Chaumont est convoqué à Oraison par le C.D.L., à une réunion pour discuter des questions de financement et de contrôle. Chaumont et Bonnaire mettent leurs fonds sur la table, il est décidé de les partager entre, l'A.S. et les F.T.P.F. Cette réunion qu'ils quittent le soir même est prolongée le lendemain avec la participation des principaux membres du CDL et quelques responsables régionaux. Les miliciens se faisant passer pour des résistants, accompagnés d'Allemands désarmés, soi-disant prisonniers, montent une mise en scène particulièrement odieuse.

Tous les dirigeants sont arrêtés ; ils seront fusillés le 18 dans un vallon près de Signes.

Les Allemands, à partir du 17 juillet, montent une grosse opération pour dégager la route Napoléon et-la RN 202 : 1500 hommes y participent et convergent sur Barrême.

À Mézel le 18 Juillet, ils arrêtent Pierre-Rose et Arnoux, ils seront fusillés en représailles lorsqu'une de leurs colonnes sera attaquée par le groupe Hervé du Maquis Fort de Fnnce à la Barre d'Auray pour se replier ensuite sur le camp de St Jurs.

Le Maquis du Lieutenant Bourdilleau, après avoir été envoyé en renfort à Barcelonnette et participé aux combats de Sauze et du Pas-de-Grégoire, était revenu à sa base de départ au sud de Beauvezer.

Lorsque la menace allemande se précise, Bourdilleau met en place une embuscade dont la réussite est complète : un camion explose et les pertes allemandes sont estimées à 58 tués.

Cette embuscade retarde la progression de la colonne ennemie dont le but est de prendre à revers les forces de la Résistance de la haute vallée du Var, attaquées au sud dans les gorges du Daluis.

Les Allemands progressent lentement sur Colmars où ils exercent des représailles (4 gendarmes fusillés), brulent le P.C. de Lécuyer à Ratéry, qui s'était déplacé à Eaux-Chaudes. ils arrivent finalement à Guillaumes le 22 Juillet, le lendemain de son évacuation par les F.F.I .

Deux autres attaques de convois allemands ont lieu les 21 et 24 juillet, l'une à Peipin par le Maquis de St-Auban, l'autre à Monestier par les hommes de Kieffer.

Chaumont rencontre le Colonel Zeller qui lui dit qu'il ne reconnaît pas la nomination de Morin.

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Le 28 juillet Chaumont reçoit de Lécuyer les nouveaux messages d'action qu'il transmet à Chabre et Trouyet.

Par ailleurs Lécuyer convoque pour le 29 à Eaux Chaudes les principaux chefs de Maquis et officiers de liaison pour faire le point de la situation après les durs combats sont poursuivis dans les trois départements (Vaucluse, Basses-Alpes et Alpes-Maritimes) du 18 au 25 juillet.

Cette réunion se termine mal ; les Allemands prévenus, investissent le hameau dans la nuit du 29 au 30 juillet Le groupe peut fuir à l'exception de Lippmann qui sera fusillé, et de deux aviateurs américains qui, étant en tenue militaire, se rendront et seront traités comme soldats réguliers.

Une autre réunion importante se tient le 4 Août au col St Jean pour régler le problème du commandement dans les Basses-Alpes après la nomination par le CDL de Morin et son manque de coopération avec Chaumont. Sur proposition de Lécuyer, Bonnaire est désigné Chef Départemental F.F.I. avec Chaumont et Morin comme adjoints.

Jusqu'au 14 août Chaumont, Morin et Bonnaire visitent les différents chefs de secteur pour leur confirmer leur commandement et leur transmettre les messages d'action.

Dès le débarquement en Provence l'ensemble des Maquis amplifient leur action, montent des embuscades et créent un climat d'insécurité sur l'ensemble du département.

District Ubaye-Verdon : dans le cadre du blocage des cols alpins pour empêcher toute pénétration allemande, les F.F.I. de l'Ubaye doivent procéder à des destructions et essayer de réduire la garnison de Larche.

Cette opération est menée à bien par Ceccaldi envoyé par Lécuyer, et Pauline, un agent du S.O.E. d'origine polonaise qui convainc ses compatriotes enrôlés par les Allemands de se rendre.

Plus au sud, attaque et prise de Castellane (17 août), les Américains arrivent le surlendemain.

District Manosque-Forcalquier attaque de convois à Peyruis et Gruis (14 août), d'un poste allemand à Brillane qui se rend (17 août).

Les postes de Manosque, St Tulle et Volx sont désarmés le 18. Les troupes de ce district participent à l'encerclement de Sisteron.

District Digne/Sisteron : attaque d'un convoi allemand aux Grillons et à Peipin (17 août). À Sisteron la garnison allemande se replie mais est bloquée à Château- Arnoux et se rend (19 août).

District Mézell-Valensole : le contact est pris le 19 avec les Américains qui ont franchi le Verdon à Quinson et se dirigent sur Digne. Leur colonne, la fameuse colonne Butler qui fonçait à travers les Alpes suivant l'idée de Zeller pour se rabattre sur le Rhône deux jours plus tard à Livron bloquant quatre divisions allemandes en retraite et permettant leur quasi destruction par l'aviation (voir :l'O.R.A. dans la Région R2') sera conduite par le Lieutenant Cheylus, officier de liaison de Lécuyer et le Capitaine Fournier de la Mission Interalliée.

Lindenmann se porte en avant et arrive également dans les faubourgs de Digne. La garnison se rend aux Américains avec à sa tête un Général, 32 officiers et 450 hommes et un abondant matériel.

Le 20 août le département des Basses-Alpes est pratiquement libéré.

Cependant les forces de la Résistance prêteront encore leur concours lorsque les Allemands tenteront le 21 août une percée depuis la vallée de la Storba en direction de Larche pour essayer de porter secours à la 11e Panzer dans la vallée du Rhône.

La défense est organisée par Bureau qui met en ligne 250 volontaires de la Vallée de l'Ubaye et fait appel à des éléments F.F.I. extérieurs. Trois lignes de résistances sont établies à Larches, St. Ours-Meyronnes et Toumoux. L'une après l'autre elles doivent être évacuées après de durs combats. -

Les premiers éléments américains -2 A.M. et deux Jeeps - arrivent le 25 au soir, le gros des forces, le 550e M.B.T.F. n'arrivera que le 29.

On peut dire que jusqu'à cette date les unités F.F.I. ont combattu seules contre un ennemi puissamment armé.

Ils continueront à le faire aux côtés des Américains sur un front s'étalant de St. Etienne-de-Tinée à Tournoux jusqu'au 27 Septembre.

© Boris de GUEYER



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