Les Faits d'Armes, Ecrits, Récits

Les Faits d'Armes, Ecrits, Récits

De Bouzèdes à Lyon et de Lyon à Nice
Année 1944

Après avoir quitté le maquis des Bouzèdes j'arrive en gare de CLERMONT-FERRAND et j'assiste à un spectacle affreux.


Toute une série de gens encadrés par la WERMARCHT marchent tête baissée, vieillards, enfants, femmes et quelques hommes, tous avec l'étoile jaune. Ce sont des juifs qui vont être déportés.


Un voyageur à côté de moi dit : « il n'y en a pas beaucoup qui reviendront ; on va les mettre dans des wagons à bestiaux avec de la chaux. Bien peu échapperont aux gaz de chaux : c’est triste et affreux. »


Je rejoins LYON mais à mon point de chute, Boulevard de SAXE, Madame DALAMON entrouvre la porte, me reconnaît et dit " je ne m'occupe plus de rien, débrouillez-vous ? et aussitôt referme la porte !

Je suis désespéré.


Mais je connais un autre agent lyonnais qui me dit avec son accent traînant : « je ne peux rien, j'ai tout laissé tomber : Démerde-toi hein ! ça sent trop le roussi ici ! Bonne chance. » (joli ces résistants de salons).


Je vais à la Mondiale, MENTHA n'y est plus il a rejoint le maquis après que la police de VICHY ait tenté de l'arrêter.


Je n'ai qu'un espoir, téléphoner à NICE pour reprendre le contact.


Deux jours d'attente.


Que ces deux jours ont été longs !


Assis sur un banc, allant à l'hôtel très tard, partant très tôt pour éviter les contrôles d'identité et vérifiant toujours les voies de repli.


Essayant d'avoir une chambre au premier sur cour, attachant un drap au balconnet et dormant tout habillé pour, en cas d'alerte, m'échapper plus vite.


Il y a énormément d'Allemands et de miliciens dans LYON.


Un jour en traversant un pont sur le Rhône, je vois BONA Président de la Chambre de Commerce de NICE, collaborateur notoire qui me connaissait bien.


Je me penche sur le pont pour regarder le Rhône ; il passe mais ne me voit pas.


Sans doute ne s'attendait-il pas à me voir ici.
S'il m'avait reconnu, il m'aurait dénoncé aussitôt.


Pour des raisons de sécurité tout est cloisonné. Mes contacts s ?étant déplacés par raison de sécurité, je suis perdu dans cette grande ville.


Quand par hasard je tombe sur des personnes qui sont entrées en Résistance pendant que j'étais détenu ils se méfient de moi.


Devant tant de difficultés, je n'ai qu'un espoir, prendre le train pour NICE.


Je vais à la gare pour prendre un billet.


Le contrôleur me dit « il ne faut pas de laisser passer mais il faut une fiche d'admission. Cela demande 8 jours. »


J’invente une urgence, le contrôleur me dit « revenez quand le chef sera parti dans un quart d'heure, j'essaierai de vous aider. »


Je reviens et il appose le tampon sur le laissez-passer. Ça y est !

Dans le train de retour, je croise DURAND gardien de la centrale. Je me tourne vers la vitre, j'espère qu'il ne m'a pas reconnu.


Aussi un grand merci à l'infirmière qui, au moment du contrôle par les Allemands dans le train, m'a pris l'épaule et me dit : " Dormez !" et aux Allemands : " C'est mon fiancé laissez le dormir." :

Elle avait dû comprendre que j'étais un Résistant !  

À la Gare de Nice mon frère vient m'accueillir, reprise de contact et de combat !



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