Les Faits d'Armes, Ecrits, Récits

Les Faits d'Armes, Ecrits, Récits

Quelques chiffres à propos du convoi qui a suivi les expulsions des quartiers Nord du Vieux Port
06-08-2016

 Renée Lopez

Extrait du Bulletin de AFMD N°-31 de juin 2016

 Quelques chiffres à propos du convoi qui a suivi les expulsions des

quartiers Nord du Vieux Port

Encore une fois il est question de l'évacuation des populations des quartiers Nord du Vieux Port de Marseille !

Il est difficile de croire que 25 000 personnes ont dû abandonner leur logis en moins de 24 heures et que parmi celles-ci 15 à 17 000 personnes ont été transférées par train à Fréjus. Le texte qui suit permet de retracer en partie le transfert des habitants vers Fréjus.

Les rafles de Marseille en janvier 1943 comptent parmi les plus importantes et les plus rapides commises par les Allemands avec la collaboration de l'Etat Français.

A partir du vendredi 22 janvier, 36 heures suffisent pour réaliser 400 000 contrôles d'identité dans la ville, puis d'arrêter et conduire 1865 personnes à la prison des Baumettes pendant la nuit du 22 au 23, suivies de 635 autres arrestations le lendemain.

Le dimanche matin, 1300 personnes des BAUMETTES auxquelles on ajoute 300 personnes retenues à l'Hôtel de Police de l'Evêché remplissent les wagons d'un premier convoi ferroviaire qui part de la gare d'ARENC pour le camp d'internement de COMPIEGNE. Parmi les 1642 détenus 800 sont juifs. (Réf : « Marseille, Vichy et les Nazis » Amicale des Déportés d'Auschwitz et des camps de Hautes Silésie » et notes p 40 de Klarsfeld)

Le même jour, aux aurores, les habitants des quartiers nord du Vieux Port, coupés du reste de la ville par les Allemands depuis la veille, sont « invités » par haut parleur à quitter leur logis pour une « évacuation de courte durée ».

Ils sont 25 000 rassemblés pour être triés à l'angle du quai Pétain et de la rue Tamaris. Environ un tiers d'entre eux : malades des hôpitaux, détenteurs de laisser-passer ou d'une adresse d'hébergement franchissent le cordon policier.

Les autres - soit entre 15 000 et 17 000 personnes - sont transportées par tramways jusqu'à la gare d'ARENC pour monter dans les wagons des 6 à 8 convois de la SNCF.

Les expulsés arrivent en gare de Fréjus entre le 24 janvier 17h30 et le lundi 25 à 6h50. (Rapports du Commissariat de police de Fréjus).

Là, transportés en cars ou en camions, ils sont conduits dans les camps militaires désaffectés de Fréjus (Caïs et La Lègue) et de Puget sur Argens.

Ces camps préparés à la hâte entre le 21 et le 22 janvier ne sont pas prêts à accueillir une telle foule : l'hygiène, la nourriture et l'hébergement sont nettement insuffisants.

Un médecin requis témoigne « J'attendais la pègre de Marseille, je ne vis que des enfants et des vieillards ».

Alors que la police française a procédé aux arrestations de Marseille, les camps de Fréjus sont contrôlés par les Allemands avec l'aide des Français.

Mais devant un tel afflux de population, l'impréparation de l'accueil et l'arrivée de parents et d'amis inquiets à Fréjus, la situation risque de devenir explosive.

 

Quelques milliers de personnes arrivent à s'éclipser tandis que pour les autres les retours sont organisés.

Selon les rapports du Commissariat de police de Fréjus :

-   Un premier convoi de 1600 personnes considérées comme prioritaires , surtout formé d'Italiens (l'Italie est alliée de l'Allemagne) , de fonctionnaires , de familles nombreuses et de vieillards quitte Fréjus le mercredi 27 janvier à 19h30 ... et arrive 18 heures plus tard pour un voyage de 150km !

- Un deuxième convoi part le vendredi 29 janvier à 17h30 avec 2500 personnes.

Un troisième convoi part le samedi 30. Constitué d'évacués sans possibilité de logement à Marseille, ils sont envoyés à Aubagne pour être ventilés dans les communes avoisinantes : Auriol, Gémenos, La Bouilladisse, La Destrousse, Roquevaire ...Les effectifs ne sont pas connus avec précision.

- Un quatrième convoi quitte Fréjus le 31 janvier avec 2600 évacués.

-   Le l' février un cinquième train renfermant 780 évacués du Vieux Port quitte Fréjus pour une destination inconnue.

En fait ce sont surtout de jeunes adultes qui sont envoyés au camp de Compiègne pour être déportés à SACHSENHAUSEN le 28 avril 1943 où « Précédés par une mauvaise réputation, ils furent fraîchement accueillis par les résistants ou les politiques ». (Maurice Perrais). Les trois-quarts d'entre eux périssent en Allemagne.

-   Le 2 février un hème convoi quitte Fréjus pour Marseille avec 2 000 évacués dont un wagon (des Juifs? des déserteurs ? des Résistants ? la quantité n'est pas indiquée) pour une destination inconnue.

Quand les évacués rentrent à Marseille, ils trouvent leurs logis pillés.

La démolition de leurs quartiers commence le ler février pour ne laisser que quatorze hectares de ruines à la fin des opérations, le 17 février.

Le 3 février à 18heures le commandant Müller, chef de la Gestapo de Marseille organise une réception suivie d'un repas pour remercier les commandants des trois camps d'accueil de Fréjus et les commandants de CMR (rapport du 3 février du commissariat de police de Fréjus).

Le 16 février le STO (Service de Travail Obligatoire) est institué. Les hommes déportés en Allemagne à partir de Fréjus, ne l'ont pas été pour refus de participation au STO. RLT

Par Renée Lopez

 

 

Texte réalisé à partir de 1 'article de Maurice FERRAIS paru dans les Annales du Sud-Est (tome XV, 1991) et repris dans la revue Gavroche n° 65, septembre - octobre 1992, p 9-10. Ils se sont référés :

-au rapport des renseignements généraux de Toulon du 1/2/1943.

aux rapports du Commissariat de Police de Fréjus ( 21&22/01/1943 ; 25/01/1943 ; 27/01/1943 ; 28/01/1943 ; 29/01/1943 ; 31/01 & 1.02/1943 ; 2.02.1943). Voir également :

-le livre : « Marseille, Vichy et les Nazis. Le temps des rafles. La déportation des juifs). Amicale des Déportés d'Auschwitz et des Camps de Haute Silésie). 2005 - la revue l'histoire n°16, Anne SPORTIELLO.



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