Actualité générale

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Faculté de Droit d'Aix-en-Provence la cérémonie de dévoilement d'une plaque commémorative en hommage à Romain GARY, compagnon de la Libération, double lauréat du Prix Goncourt.
13-05-2014

 Sous le haut patronage de Monsieur Kader ARIF, Secrétaire d’Etat auprès du Ministre de la Défense, chargé des Anciens Combattants et de la Mémoire, s’est tenu dans le grand hall de la Faculté de Droit d’Aix-en-Provence la cérémonie de dévoilement d’une plaque commémorative en hommage à Romain GARY, compagnon de la Libération, double lauréat du Prix Goncourt.

Lors de cette manifestation, étaient présentes les autorités suivantes :

-        Monsieur Yvon BERLAND, Président de l’Université d’Aix-Marseille

-        Madame Maryse JOISSAINS-MASINI, Maire d’Aix-en-Provence, représentée par un membre de la Mairie

-        Monsieur Valéry CHAVAROCHE, délégué de l 'association Mémoire et Espoirs de la Résistance  .

-        Monsieur Patrick BRETHES, Délégué de la fondation de la France Libre

-        Monsieur Philippe BONFILS, Doyen de la faculté de droit et science politique

Toutes ces personnalités ont fait devant l’assistance un hommage à Romain GARY et Patrick BRETHES a lu le message de Monsieur Kader ARIF.

 Mesdames, Messieurs,

Je regrette de ne pouvoir être à vos côtés à l'occasion de la célébration du 100eme anniversaire de la naissance de Romain Gary .Cependant par ce message je souhaiterais rappeler le parcours d'une personnalité aussi riche que marquante de notre histoire contemporaine. Je tiens tout d'abord à remercier Monsieur Yvon Berland, président d'Aix-Marseille-Université, monsieur Philippe Bonfils , doyen de la faculté de Droit et de Sciences-Politiques ,Madame Maryse Joissains Masini , Maire d'Aix-en-Provence , Président de la Communauté du Pays d'Aix qui accueillent aujourd'hui une cérémonie à la mémoire de ce grand romancier derrière lequel se cache un aviateur des Forces aériennes de la France Libre, Compagnon de la I.ibération mais aussi un journaliste, un diplomate ou encore un cinéaste.

Romain Gary est d'abord cet écrivain-combattant, connu pour avoir écrit des livres inspirés de ce qu'il a vécu pendant la Seconde Guerre mondiale, des livres, pour le citer, « nourris de ce siècle, jusqu'à la rage ». Nombreux sont ceux qui ont été directement ou indirectement touchés par cette guerre. Rares sont, en revanche, ceux qui ont pu et su mettre des mots sur cette terrible épreuve.

Romain Gary le fait avec courage, talent et authenticité, jetant au cœur de sa plume toutes ses convictions. Son audace lui vaudra, grâce au subterfuge du pseudonyme, de recevoir deux prix Goncourt, l'un pour Les Racines du ciel en 1956 et l'autre pour La vie devant soi en 1975, fait sans précédent dans l'histoire littéraire. Beaucoup connaissent aujourd'hui l'écrivain.

Mais peu savent que Romain Gary se destinait plus à une carrière dans l'aviation militaire que dans la littérature française.

Au sein de son unité, Romain Gary intervient à Koufra en Libye, en Abyssinie et en Syrie avant d'être nommé sous-lieutenant. Il rejoint ensuite l'escadrille de surveillance côtière en Palestine. En juin 1942, il est nommé officier de liaison à l'État-major des Forces aériennes de la France Libre du Moyen-Orient avant de rejoindre au mois d'août l'escadrille Nancy du groupe de bombardement Lorraine.

Promu lieutenant en décembre 1942, il est envoyé sur le front de l'Ouest. Il se distingue le 25 janvier 1944 quand, leader d'une formation de 6 appareils il est blessé par un éclat d'obus et réussit malgré tout son bombardement puis ramène l'escadrille à la base. Décoré de la Croix de guerre par le général de Gaulle en janvier, il est fait compagnon de la Libération le 20 novembre 1944.

Il résume ainsi son expérience de la guerre : « ma France, c'est la France Libre». Voilà une déclaration audacieuse pour celui qui n'était pas né en France et qui fut un si grand français ! Celui, aussi, à qui le grade d'officier avait été refusé à la sortie de l'École de l'Air en 1.938 sous prétexte qu'il n'était pas français depuis assez longtemps.

Le hasard de l'histoire fait naître la même année que Romain Gary - et des 80 ans de l'armée de l'air, je tenais aussi à rappeler le parcours de ce grand aviateur qui décide de rejoindre les forces de la France Libre dès juin 1940. Après 25 missions offensives et plus de 65 heures de vol en guerre, il n'acceptera jamais d'être traité en « héros », préférant le terme de « survivant ».

Arrivé à Glasgow le 22 juillet 1940, il demande à servir dans une unité combattante. Il racontera quelques années plus tard : « J'ai vu à ce moment-là une jeunesse absolument splendide, la jeunesse anglaise, à laquelle s'étaient joints les éléments de la jeunesse française, polonaise, tchécoslovaque, yougoslave, grecque, hollandaise... »

C'est là aussi, dans les Forces Françaises Libres, que Roman Kacew prend le nom de Romain Gary comme si son engagement allait faire de lui un autre homme, comme si une page se tournait, comme s'il n'était plus cet émigré venu de Lituanie mais bel et bien ce combattant français décidé à servir et sauver l'honneur de son pays.

Patriote venu d'ailleurs, Romain Gary est resté fidèle à cette France Libre jusqu'à sa mort. Je rends hommage, à travers lui, à cette France de toutes les origines et de toutes les couleurs qui jamais ne perdit espoir, qui toujours eut confiance en la victoire de ses valeurs républicaines.

Bien que son humilité et sa pudeur l'eussent certainement conduit à refuser un tel hommage, je vous remercie tous une nouvelle Cois de préserver la mémoire de cet homme qui a marqué de son empreinte l'histoire littéraire et militaire de notre pays pour que vive la République et que vive la France I.

Kader ARIF

Patrick BRETHES Lisant le message du Ministre.

 

Puis  M. Valéry CHAVAROCHE, au nom de la Fondation de la France Libre et de l’association Mémoire et Espoirs de la Résistance a pris la parole.

 

Mesdames, messieurs,

Nous sommes entrés en 2014 dans une série faste de commémorations. C’est l’honneur du Président d’Aix Marseille Université, Yvon Berland, du doyen de la Faculté de droit et de science politique, Philippe Bonfils, d’inaugurer le Centenaire de la naissance de Romain Gary. Ce projet a été l’objet de leurs plus vifs intérêts. L’expression de notre gratitude va également à M. le Secrétaire d’Etat auprès du Ministre de la Défense, chargé des Anciens Combattants et de la Mémoire, Kader Arif, pour le précieux haut patronage qu’il nous a accordé.  On doit ici saluer aussi le général Francis Pollet, commandant des Ecoles d’officiers de l’Armée de l’Air, accompagné d’une délégation d’élèves-officiers de l’Ecole de l’Air de Salon-de-Provence, et la représentation du Lycée militaire d’Aix, en la personne de son chef de corps, le colonel Vincent Pasquiet.

 

 Nous vous sommes très reconnaissants, mesdames et messieurs, d’honorer l’Université et la Faculté de votre présence qui consacre votre fidélité au souvenir de Romain Gary, le respect que nous portons à son action, et les liens personnels d’affection entretenus avec son œuvre littéraire.

L’initiative de cet hommage revient aussi aux fondations et associations attachées à promouvoir la mémoire de la France Libre, de la Résistance et de la Déportation  : en premier lieu l’Association Mémoire et Espoirs de la Résistance, ainsi que la Fondation de la France Libre. Je n’aurais garde d’oublier le soutien d’un aréopage de responsables associatifs ici présents : Mme Suzanne Gérard-Vaïsse, présidente du Mémorial Jean Moulin , dont le frère, Henri Vaïsse, mourut pour la France dans le maquis de Lambesc, le 12 juin  1944, M. François-René Cristiani-Fassin, administrateur de l’association Mémoire et Espoirs de la Résistance, dont le père, Raymond Fassin, officier des Forces aériennes françaises libres, parachuté avec Jean Moulin sur la Provence dans la nuit du 1er au 2 janvier 1942, mourut pour la France en déportation, et Me Raymond Alexander, Président de l’association Mémoire vive de la Résistance, et fils du bâtonnier et grand Résistant Edouard Alexander, et la Fondation du Camp des Milles. Les associations, outils de la démocratie, telles l’association Mémoire Vice de la Résistance, constituent bel et bien la plus tocquevillienne de nos libertés.

Preuve est faite que l’on conserve dans cette Université qui s’enorgueillit de son 6e Centenaire célébré en 2009, la conscience d’une grande responsabilité face à l’Histoire, cet invariant qui nous constitue.

Il faut avoir le goût du risque pour évoquer Romain Gary : celui-ci était prompt à fustiger ce qu’il appelait « tous ces bavards ». Romain Gary avait, il est vrai, des manières empreintes parfois de quelque brusquerie qui ne visait qu’à masquer sa vraie nature, son extrême vulnérabilité, son anxiété et surtout sa profonde bonté .

Ses multiples talents empêchent de cataloguer Romain Gary : il fut tout ensemble un immense écrivain, un héros de la France Libre, mais aussi un diplomate, un cinéaste et un grand reporter. Dans la France mère des armes et des lois, sa vie est placée sous le double signe des valeurs intellectuelles et morales, déclinées dans le droit, l’armée, la diplomatie et la culture, autant dire dans la multiplicité, y compris des pseudonymes. Personnage considérable, il a ensuite été, comme bien des personnalités considérables, victime d’une grande injustice. Dans la France des années 1970, il fut souvent regardé avec condescendance par les milieux littéraires ; on prenait un malin plaisir à le cataloguer comme un écrivain réactionnaire et conventionnel. Certains académiciens proches de l’extrême droite s’opposèrent à ce que l’on envisageât son éventuelle élection à l’Académie Française. Romain Gary s’en souciait comme de 39 en l’an quarante, considérant que la distinction de Compagnon de la Libération valait titre de chevalerie.

 

Ainsi, en rendant cet hommage à Romain Gary,  le Président Yvon Berland et le doyen Philippe Bonfils démontrent que le droit constitue un acte de partage de biens matériels mais aussi immatériels. La Faculté illustre cet impératif bien connu du droit romain  : «  suum cuique tribuere », « donner à chacun son dû ».

Cette date du 13  mai, fixée par l’Université, nous ne l’avons pas choisie, mais notre première réaction fut très positive : on sait l’importance du 13 mai 1958 dans le processus de retour au pouvoir du général de Gaulle.  Romain Gary avait pour l’homme du 18 juin, une véritable vénération . Romain Gary avait été abandonné par son père : contre l’hérédité d’un père absent, il choisit sa paternité en la personne du général de Gaulle. Cette inscription dans la filiation gaullienne était à la fois un orgueil mais aussi une humilité dans une époque où l’homme veut être son propre auteur. La fibre gaullienne de Romain Gary s’explique aisément : c’est le général de Gaulle qui, en 1941, fera accéder Romain Gary au statut d’officier, lui qui n’était jusque-là que simple sous-officier .  C’est le général de Gaulle qui décernera à Romain Gary la Croix de Compagnon de la Libération. Romain Gary considérait donc qu’il devait au seul général de Gaulle de n’être plus considéré comme un immigré juif mais comme un Français à part entière.

Car la France, assemblage permanent de la diversité, fut d’abord pour Romain Gary un pays d’accueil et d’ouverture, de fraternité et d’intégration voire d’assimilation  : Romain Gary, adolescent juif lituanien, fut d’abord un immigré, « l’un de ceux, écrivit Jean Daniel à la mort de Romain Gary, à propos desquels on se demande aujourd’hui s’il faut tous les garder, comment s’y prendre pour vivre avec eux, et s’ils s’accordent bien aux tendances profondes du génie français ». Une grande partie de sa famille, restée en Lituanie et dans le ghetto de Varsovie, eut à subir les foudres de la Shoah. Lui-même vécut la xénophobie de la France des années trente : terminant ses études à Paris, il vit le grand professeur de droit Gaston Jèze victime des actions musclées des étudiants d’Action Française. Romain Gary se revendiquait patriote et récusait tout nationalisme  en ces termes bien connus : «  le patriotisme, c’est d’abord l’amour des siens, le nationalisme, c’est d’abord la haine des autres. Le nationalisme, ce n’est pas moi ». Grâce à la République, à l’Ecole et à l’Université, Romain Gary a pu emprunter la route du savoir et de la culture qui menait encore à la vraie notoriété. Adolescent, il n’eut de cesse que de se fondre dans le creuset de la nation, «  ce mystère admirable où éclate la grande âme de la France », «  ce riche legs de souvenirs, ce désir de vivre ensemble, de continuer à faire valoir l’héritage qu’on a reçu indivis », selon les mots de Jules Michelet et d’ Ernest Renan, cette France « vouée à une destinée éminente et exceptionnelle, créée pour des succès achevés ou des malheurs exemplaires », nous dit le général de Gaulle dans ses Mémoires de guerre. Romain Gary aimait à le rappeler : « La France Libre est la seule communauté à laquelle j’aie appartenu à part entière, c’est une fraternité que je n’ai retrouvée nulle part ailleurs ».

Et pourtant, cette foi inébranlable dans la France aurait pu être ébranlée par les nombreuses discriminations, négatives, dont Romain Gary fut souvent victime. Après le service de la France durant la guerre, Romain Gary se mit en 1945 au service de l’Etat. Sa carrière de diplomate ne fut en rien favorisée par ses titres de gloire militaire. Ses sept années passées sous l’uniforme de 1938 à  1945 ne furent pas prises en compte pour la reconstitution de sa carrière, débutée comme obscur administrateur de 3e classe. En dépit de sa maîtrise de l’anglais, de l’allemand, du russe et du polonais, Romain Gary fut souvent cantonné dans des emplois subalternes. Même s’il fut un diplomate, un consul général exemplaire par son engagement et son humanité, Romain Gary se sentait mal à l’aise dans l’univers mondain du Quai d’Orsay et il eut à subir les avanies de plusieurs ambassadeurs qui avaient pris dès 1940 le chemin de Vichy et poursuivaient depuis, brillamment leur carrière. Romain Gary occupa quelques postes importants, notamment au sein de la représentation permanente de la France au Conseil de sécurité de l’ONU, et ce en raison de ses incontestables qualités linguistiques et juridiques, mais il préféra abandonner la diplomatie pour se consacrer pleinement à l’écriture, en lançant : « Laissez-les oublier tranquillement ma Croix de Compagnon de la Libération, ma Légion d’honneur, ma Croix de guerre et le fait que j’ai donné mon sang pour mon pays. Mes camarades et moi-même n’avons jamais espéré autre chose que la bassesse en guise de remerciement. Je pourrais en mettre plein la vue à tous vos Trissotins sortis de Normale Sup  ». Cette réflexion désabusée de Romain Gary ne donne que plus de relief encore à cette cérémonie.

Il est heureux que les commémorations du Centenaire de la naissance de Romain Gary s’ouvrent aujourd’hui à Aix, en Provence. Romain Gary considérait Nice comme sa «  chère ville presque natale » ,  ses cendres furent dispersées dans l’encre bleue de la Baie des Anges ; toute sa vie, il s’est appuyé à la beauté de la Côte d’Azur et a porté des regards émerveillés sur la Provence. Il a continûment repris l’affirmation de « La Promesse de l’aube » :

«  Chère Méditerranée ! Que ta sagesse latine, si douce à la vie, me fut donc clémente et amicale, et avec quelle indulgence ton vieux regard amusé s’est porté sur mon front d’adolescent ! Je reviens toujours à ton bord, avec les barques qui ramènent le couchant dans leurs filets. J’ai été heureux sur ces galets ».

Cette cérémonie aixoise est d’autant plus émouvante que le Président Yvon Berland et le doyen Philippe Bonfils ont souhaité que cette plaque fût apposée près de celle saluant la mémoire de René Cassin. Comme Romain Gary, René Cassin avait passé ses premières années à Nice, avait étudié au lycée Masséna, avant d’apprendre puis d’enseigner le droit dans cette faculté d’Aix. On verra aussi un signe dans le fait que l’Ordre des Compagnons de la Libération a été créé par ordonnance du 16 novembre 1940 du général de Gaulle, afin de récompenser, je cite le Général, «  des mérites hors de pair ». C’est le professeur René Cassin, lui-même Compagnon de la Libération, comme Romain Gary, qui conçut et rédigea les statuts de cette distinction. Elle n’a été attribuée qu’à 1038 hommes et femmes qui sont les représentants de toutes celles et ceux qui n’ont pas été décorés en dépit de leurs vertus . Il s’agit de la distinction la plus prestigieuse, la plus exceptionnelle et la plus rare au titre de la 2e Guerre mondiale. Son prestige est lié à la parcimonie avec laquelle elle a été décernée. Sa devise latine a été voulue par le général de Gaulle : « Patriam servando, victoriam tulit » : « en servant la patrie, il a apporté la victoire ».

De fait, dès juin  1940, à l’un des pires moments de notre histoire, la France n’étant plus la France, la souveraineté de la nation étant aliénée, Romain Gary sera l’un des tout premiers à refuser la fatalité de la défaite et à rejoindre la France Libre. Ce que la République lui a donné, Romain Gary a entrepris de le lui rendre au centuple, en servant les Forces aériennes françaises libres. Il s’engage comme navigateur-bombardier au sein du groupe Lorraine, composé des escadrilles Metz et Nancy, aux côtés notamment de Joseph Kessel. Romain Gary y subit un entraînement intensif et accomplit de nombreuses missions de bombardement extrêmement dangereuses, à très basse altitude, pour échapper aux défenses antiaériennes allemandes, ce qui rendait impossible toute extraction par parachute en cas de difficultés. Un chiffre donne la mesure de l’hécatombe : en 1945, lorsque le capitaine Romain Gary est décoré de la Croix de Compagnon de la Libération sur la place Stanislas à Nancy, il ne reste que 5 survivants des premiers engagés de 1940. 108 des premiers volontaires étaient morts en service aérien. Romain Gary fut grièvement blessé, le 25 janvier 1944, ainsi que son pilote Arnaud Langer ; tous deux réussirent l’exploit d’achever leur mission et de ramener leur appareil à la base. Ce haut fait d’armes fit la une de la presse et leur valut d’être élevé à la dignité de Compagnons de la Libération par le général de Gaulle. Déclaré inapte médicalement au vol, Romain Gary est nommé chef de la chancellerie à l’état-major des Forces aériennes françaises libres. Sa formation de juriste, sa culture, sa pratique des langues y sont très appréciées. On peut lire cette appréciation dans son dossier militaire en 1945 :

«  Romain Gary, belle figure d’aviateur. Sur la brèche dès l’époque héroïque de 1940. Cultivé, fin, intelligent, un peu bohême mais sans excès, tenue parfois négligée, souvent ultra futuriste, horaires approximatifs, sauf lorsqu’il s’agit de l’essentiel : les vols à accomplir. Eminemment sympathique, capable de rendre de grands services, aussi bien en unité aérienne qu’à l’état-major. Brillant sujet qui a vaillamment fait ses preuves, même éloigné du combat, malgré lui, après sa blessure. Il s’est révélé un précieux officier qui donne toute satisfaction à l’état-major. »

Ainsi donc, au regard du cursus juridique et du parcours militaire de Romain Gary, comment ne pas faire redire en exergue au général de Gaulle :

« Au fond de l’abîme, la Résistance s’est accrochée à deux môles qui ne cédèrent pas. L’un était un tronçon du glaive, l’autre la pensée française. Au fond des victoires d’Alexandre, on trouve toujours Aristote ».

S’il s’était trouvé un père en la personne de Charles de Gaulle, Romain Gary avait découvert la fraternité de combat dans les Forces aériennes françaises libres. Il régnait en effet entre le personnel navigant et les mécaniciens au sol une fraternité d’escadrille, comme il exista, dans le danger, une fraternité de tranchées, de réseau de Résistance, de camp de concentration, cet agir ensemble, cette main tendue à l’inconnu au risque de sa propre vie. Dans les Forces aériennes françaises libres, Romain Gary avait découvert une famille d’élection, sous l’égide du général de Gaulle.

Au demeurant, l’engagement de Romain Gary dans les Forces aériennes françaises libres ne le prédisposait-il pas à servir la France, après-guerre, dans la diplomatie ? De fait, les 3000 aviateurs des Forces aériennes françaises libres, dont les escadrilles portaient le nom de provinces françaises, furent aussi des diplomates et des ambassadeurs de la France Libre pour le général de Gaulle. Pensons notamment à l’escadrille française libre Normandie Niémen , engagée sur le front russe , qui permit au général de Gaulle de conforter sa position internationale, au travers du traité d’amitié franco-soviétique de décembre 1944. Soit dit au passage, l’épopée de l’escadrille française Normandie Niémen est de nos jours mieux connue et mieux enseignée en Russie qu’en France qui oublie et même abandonne trop souvent son histoire.

Tel est donc avec Romain Gary, l’homme au destin fabuleux, mieux qu’Amélie Poulain, que nous tenons à honorer aujourd’hui, sans oublier naturellement l’écrivain. Parmi les tout premiers Français Libres, Romain Gary, révolté par le massacre des animaux en Afrique, fut aussi le premier écrivain à signer un roman écologique : Prix Goncourt, « Les Racines du ciel » nous alertent, dès  1956, sur les risques d’un désastre écologique. Avec Elie Wiesel, Romain Gary fut aussi l’un des premiers auteurs à avoir fait entrer la Shoah dans la littérature française :

«  Il y a des morts, écrivait Romain Gary, qui ne meurent jamais. Il y a d’ailleurs en yiddish une expression qui vient du droit romain : le mort saisit le vif. »

A présent, les étudiants de cette Université pourront se ravitailler, s’enrichir, s’arracher à eux-mêmes,  se grandir, en liant personnellement et existentiellement connaissance avec Romain Gary, cet inconnu désormais familier. Il leur reste le legs précieux de son œuvre riche et exemplaire et de son chef d’œuvre, « La Promesse de l’aube ».

Cette rencontre pourra engendrer notre jeunesse à l’espérance. A tous points de vue, cette plaque y contribuera.

La manifestation s’est déroulée devant les élèves de l’Ecole de l’Air de Salon-de-Provence.

Etaient également présents dans la salle :

-        Le Colonel PASQUIET dirigeant l’Ecole Militaire d’Aix-en-Provence

-        Madame Marie-Thérèse CLAVERIE

-        Monsieur et Madame CHINY

-        Monsieur François-René CRISTIANI-FASSIN, ancien Président régional du Mémorial Jean MOULIN

-        Madame Suzanne GERARD-VAYSSE Présidente du Comité Régional du Mémorial Jean MOULIN

-        Maître Raymond ALEXANDER, Président de la MVR et Vice-Président du Comité Régional du Mémorial Jean MOULIN.

A l’issue des, la plaque a été dévoilée et les parties ont entonné la Marseillaise a capela.

Cette manifestation s’est terminée autour d’un buffet convivial qui a donné aux parties l’occasion d’échanges sur Romain GARY et sur la Résistance.



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